Fiche Légende : Gino Marchetti

#76,89 – Defensive End

 

 

Présentation

 

GÉNÉRALITÉS
Nom complet Gino John Marchetti
Date de Naissance 2 Janvier 1926
Lieu de Naissance Smithers, Virginie de l’Est
Date de Décès 29 Avril 2019
Lieu de Décès Paoli, Pennsylvanie
CARRIÈRE
Lycée Antioch High, Californie
Université San Francisco
Draft 2e tour de 1952 (#14)
Équipes Dallas Texans (1952)
Baltimore Colts (1953-1964, 1966)
Statistiques 14 saisons
161 matchs – 151 comme titulaire
13 fumbles recouvrés
1 interception
2 touchdowns
HONNEURS
Pro-Bowls 11 (1954-1964)
All-Pro 10 (1955-1964)
Performances notables
Récompenses 2 titres de champion NFL (1958, 1959)
Membre de l’équipe NFL des années 1950
Membre de l’équipe des 75 ans de la NFL
Membre du Ring Of Honors des Ravens
Numéro #89 retiré chez les Colts
Hall Of Fame Classe de 1972

 

Biographie

 

Quand Gino Marchetti commence à s’intéresser au football, Ernesto (Ernest) a très peur pour la santé de son fils ; il est vrai que ce « football » n’a rien à voir avec le « football » qu’il connaît dans son Italie natale. Il dit clairement à son fils de s’écarter du chemin de ses adversaires pour ne pas se blesser, et c’est d’ailleurs pour cela qu’il ne regarde jamais un match. Il est peu dire que Gino n’a pas tout à fait suivi les conseils paternels à la lettre, mais contrairement à ce qu’Ernest craignait, c’est surtout pour ses adversaires que cela s’est mal terminé… à une exception près.

Gino Marchetti naît en janvier 1926 à Smithers, dans l’état de Virginie de l’Est. Ses parents, Ernesto et Maria, ont émigré d’Italie quelques mois plus tôt en provenance de la ville de Lucca, en Toscane ; une ville qui, coïncidence frappante, a été fertile en talents NFL puisque le Hall Of Famer Leo Nomellini y est également né. Peu après, la famille déménage à travers le pays pour s’installer à Antioch, en Californie, où Ernest tient un bar. Contrastant avec beaucoup d’autres membres de Canton, Marchetti n’est pas spécialement attiré par le sport quand il est jeune ; il se contente de s’amuser avec ses amis comme tous les enfants le font, mais il faut attendre sa dernière année au lycée d’Antioch (1943) pour qu’il s’inscrive à son équipe de football. Néanmoins, déjà à cette époque, il est vu comme un futur talent.

Mais il doit mettre tout cela entre parenthèses (le lycée et le football) car la Seconde Guerre Mondiale fait rage : il décide de quitter le lycée pour s’enrôler dans l’armée. Il est mitrailleur au sein de la 69e division d’infanterie et se retrouve au milieu de la terrible bataille des Ardennes de l’hiver 1944. Il en revient indemne mais se retrouve déconnecté du système éducatif ; il rejoint le bar de son père et y travaille quelques temps tout en renouvelant son amour du football par la création d’une équipe semi-professionnelle, les Antioch Hornets. C’est alors qu’un membre du coaching staff de l’équipe du Junior College de Modesto le remarque : venu pour recruter Angelo, le frère de Gino, il en profite pour pousser les deux à intégrer la structure. Cela permet à Gino de raccrocher les wagons de l’éducation, mais il ne va pas rester longtemps en place : un an plus tard, en 1948, un scout de l’Université de San Francisco lui propose de faire un test.

Le Head Coach de l’équipe, Joe Kuharich, n’est pas impressionné… jusqu’au moment où Marchetti va sur le terrain au poste de Tackle et domine la concurrence. Il intègre l’équipe des Dons qui empile les talents, termine la saison 1951 avec un bilan immaculé de 9-0… et montre de sérieuses valeurs éthiques. À l’époque, les Bowls sont sur invitation ; le Sugar Bowl, l’Orange Bowl et le Gator Bowl considèrent inviter l’équipe, mais il y a un « problème » : ils sont tous localisés dans le sud du pays, historiquement ségrégationniste, et il y a deux joueurs afro-américains chez les Dons – Burl Toler et Ollie Matson. L’Orange Bowl finit par inviter l’équipe mais à la condition que les joueurs afro-américains ne jouent pas ; d’un commun accord, les Dons refusent de participer.

La carrière footballistique particulière et chaotique de Marchetti n’en est pas encore à son dernier détour : ses performances sur le terrain, alliant férocité, agilité et puissance, sont remarquées par la NFL ; il est drafté par les New York Yanks en 1952. L’équipe disparaît dans les mois qui suivent : elle est rachetée et délocalisée à Dallas pour devenir les Texans. À 25 ans, Marchetti joue son premier match professionnel, mais la franchise disparaît à son tour à la fin de la saison. Elle est rachetée par Carroll Rosenbloom et déménage à Baltimore pour devenir les Colts. Marchetti est alors replacé pour jouer Offensive Tackle, un poste qu’il n’aime pas du tout. Heureusement, cela change en 1954 avec l’arrivée du nouveau Head Coach et futur Hall Of Famer Weeb Ewbank ; il reconnait le talent de Marchetti mais le déplace de l’autre côté du ballon, en Defensive End. Le joueur admettra plus tard que, s’il a détesté jouer Offensive Tackle, cela lui a appris comment ils fonctionnent, et donc donné les clés pour les battre.

C’est une décision géniale : Marchetti crée de suite la panique dans les backfields, plaquant les coureurs mais surtout « sackant » les Quarterbacks (le terme n’existe pas encore et ils ne sont donc pas encore comptabilisés). Il démarre une série de 11 Pro-Bowls consécutifs alors que les adversaires peinent à le contenir. En parallèle de sa légende, celle des Colts grandit aussi : sous l’impulsion de Ewbank et avec l’arrivée de jeunes talents, ils progressent d’année en année. En 1955, Marchetti est tellement dominateur qu’il reçoit son premier de 10 votes All-Pro consécutifs ; en 1958, il fait partie d’une équipe de Baltimore qui remporte son premier titre de division et dispute la finale NFL contre les Giants. Ernest décide enfin de surpasser sa peur d’une blessure de son fils pour regarder le match.

C’est le fameux Greatest Game Ever Played, le moment où le football professionnel a conquis le coeur des américains ; la première finale NFL télévisée dans tout le pays. Marchetti se fait de suite remarquer en renvoyant la première passe des Giants, et sa présence est sentie pendant tout le match… ou presque. Sur l’avant-dernier drive, alors que les Giants mènent 17-14 et veulent inscrire le touchdown qui mettrait définitivement les Colts à distance, le coureur Frank Gifford est à un yard de gagner un first down mais Marchetti le plaque juste avant ; malheureusement, son partenaire Eugene « Big Daddy » Lipscomb retombe sur sa jambe et lui fracture la cheville.

Le #89 doit sortir du terrain mais il refuse de rentrer se faire soigner au vestiaire : sur la civière placée en touche, il regarde les Giants punter, et Johnny Unitas mener le drive de l’égalisation qui force la prolongation. Un nouveau drive de Unitas permet à Baltimore de l’emporter sur une course au près d’Alan Ameche, mais Marchetti n’est déjà plus sur la touche : craignant pour sa sécurité si les fans envahissent la pelouse, le staff l’a rapatrié dans les vestiaires. C’est la seule blessure grave qu’il subira, mais il a fallu que ce soit dans le premier match que son père est venu voir, comme quoi le Destin écrit son propre scénario.

Quoi qu’il en soit, Marchetti se remet de sa blessure et rempile en 1959, tout comme la franchise qui gagne un deuxième titre contre les Giants (de manière moins théâtrale). Il se diversifie également dans ses activités : avec plusieurs partenaires, il ouvre un fast-food, Gino’s, qui va rapidement se développer à une époque où McDonald’s existe déjà mais se cantonne surtout sur la côte ouest. Assez rapidement, le restaurant devient une véritable chaîne comptant plusieurs centaines d’enseignes, et Marchetti est surnommé « le Roi du Hamburger de la Côte Est ». Sur le gridiron, il continue de cuisiner ses adversaires, enchaînant les récompenses et les louanges ; des futurs Hall Of Famers comme le Head Coach des Rams Sid Gillman ou le Right Tackle des Packers Forrest Gregg le présentent comme le meilleur joueur de la NFL. Cela dure jusqu’en 1964 (avec une troisième finale cette fois perdue) alors qu’il a 38 ans, prouvant qu’il est non seulement excellent mais durable.

Il prend une retraite bien méritée qu’il interrompt juste pour quelques matchs en 1966 car l’équipe manque de joueurs à cause des blessures. Sans surprise, les récompenses continuent de tomber dans son escarcelle : déjà sélectionné comme un des Defensive Ends de l’équipe NFL des années 1950, il est intronisé au Hall Of Fame en 1972 – en même temps que son ancien partenaire des Dons Ollie Matson et un peu avant un autre (Bob St. Clair), il est élu dans l’équipe des 75 ans de la NFL, son numéro est retiré chez les Colts, il est ajouté au Ring Of Honor de la nouvelle équipe de Baltimore (les Ravens)… et il revend la chaîne Gino’s pour la modique somme de 48M$ en 1982.

Il mène alors une vie longue et paisible jusqu’à sa mort suite à une pneumonie en avril 2019, à l’âge de 93 ans. Le prototype du Defensive End d’aujourd’hui aura connu un parcours atypique, mais couronné de succès que ce soit sur et en dehors du terrain.