Mailbag QPUL : attaque, attaque, attaque !

Encore pas mal de questions intéressantes, c’est parfois dur de faire le tri, mais sachez que si ce n’est pas pour cette fois ce sera pour la prochaine.
Je tiens à préciser pour ceux qui demandent un récap des franchises avec la FA et la draft que c’est plus un article complet qu’un sujet de mailbag, ça sera traité à part plus tard.

Cette semaine, même si on regarde toujours un peu du côté de la défense, on a eu pas mal de questions concernant l’attaque.

Alors on s’y colle Anatole.


Hugo B. : On remarque que de plus en plus les offenses en NFL se tournent vers le jeu de passe et cela jusqu’à même arriver à un certaine négligence du jeu de course (…). Comment s’explique ce phénomène, est-ce là une explication « historique » ou bien sommes-nous finalement qu’en face d’un effet de mode ?
Les deux mon capitaine :), même si le « effet de mode » n’est pas totalement exact : ça implique que ce serait une tendance passagère alors qu’au contraire ça va probablement devenir la norme.
Le grand méchant Blount

L’attaque a commencé à être avantagée en 1978, lorsque les défenses comme celles des Steelers et des Raiders fracassaient les adversaires sans retenue (car c’était légal). Le total de points en 1977 était le plus faible depuis les années 1940s, donc la ligue a décidé d’inclure de nouvelles règles pro-offense, dont la fameuse Mel Blount Rule du nom du terrible DB des Steelers : les DBs n’avaient plus le droit de toucher le receveur après les 5 premiers yards de son parcours (règle encore en place aujourd’hui). Ca a grandement aidé le jeu offensif et le spectacle.

C’est cette notion de « spectacle » associé à la notion de « sécurité » qui ont poussé ces derniers temps les attaques NFL vers le jeu de passe. Si on résume les règles mises récemment en place, qu’est-ce qu’on voit ? Protection du QB, protection des receveurs. Pourquoi ? Parce que le jeu de passe est spectaculaire pour le néophyte, bien plus qu’une course au centre qui gagne 2 yards. Ne croyez pas que les franchises NFL ont décidé toutes seules de privilégier la passe : Roger Goodell a mis en place un environnement dans lequel le jeu de passe est favorisé, comme les règles de 1978 ont mis en place un environnement dans lequel les attaques étaient favorisées.
Ce dont il faut se souvenir, c’est que tout ça n’a pas empêché les Bears de 1985, les Ravens de 2000, les Buccs de 2002 ou les Steelers de 2005/2008 de gagner le titre avec de grosses défenses.

Hugo I. : L’une des raisons de l’explosion des stats à la passe cette saison est en partie due à l’éclosion des TE (Gronk et Hernandez pour les Pats, Graham pour les Saints), comment les défenses peuvent elles s’adapter à ses joueurs (surtout quand ils sont aussi bien épauler que chez les Saints ou les Pats) ?
Tiens, encore un Hugo qui parle lui aussi de l’explosion de la passe cette année :p.
Il est vrai que dans cette accumulation de yards, certains TE se sont particulièrement illustrés : Gronk et Graham sont les deux noms qui viennent à l’esprit. Les défendre est le problème qu’ont connu tous les DC a essayé de couvrir John Mackey, Kellen Winslow, Tony Gonzalez, Antonio Gates ou Jason Witten : ils sont trop rapides pour un LB, et trop fort pour un DB.

Si je savais comment les arrêter, je serais probablement DC dans une équipe NFL :). Pour moi, on peut essayer de se reposer sur les schémas autant qu’on veut, le foot reste un duel d’hommes : il faut que les Linebackers suivent la même évolution que les TE et deviennent le même mix entre puissance et rapidité. Regardez ce qu’il s’est passé, par exemple, quand Lawrence Taylor est arrivé dans la ligue : les OC ont essayé tous les schémas pour l’arrêter, mais rien n’a marché, parce que tant que vous n’aviez pas un bonhomme avec les capacités athlétiques pour contrer LT, ce n’était pas possible. Alors on met deux types sur lui ? Si vous mettez deux types sur un TE… je vous laisse terminer la phrase.

Ici, je pense, c’est la même chose : tant que vous n’avez pas les joueurs pour contrer de telles armes, tous les schémas défensifs du monde se planteront. C’est pourquoi, l’année prochaine, attendez-vous à voir pas mal d’équipes copier les Patriots et avoir des formations à deux TE.

Ce qui est ironique cependant, c’est que si les DC décident de contrer les TE en dévouant plus de ressources contre la passe, il est possible que tel un effet de pendule, le jeu revienne plus vers la course parce que justement il n’y aura plus assez de forces en présence pour couvrir les deux.

Philippe : En tant que fan des Ravens, j’ai souvent entendu parler de la spécificité de Vonta Leach comme étant un des derniers fullback : précisément, pourquoi ça disparait (darwinisme ?) et pourquoi certains subsistent (comme Denver, le dinosaure, pas les broncos) ?

C’est un des derniers. John Kuhn des Packers, Marcel Reece des Raiders ou Ovie Mughelli anciennement des Falcons sont les derniers représentants d’une race en voie d’extinction, justement parce que la NFL se détourne lentement mais sûrement du jeu de course.

Ceux qui subsistent le font de différentes manières : Leach est un super bloqueur qui à un coureur monstre derrière lui, donc il est toujours utile. Reece protège McFadden donc peut encore être utile (surtout quand on connaît la fragilité du coureur). Kuhn est un excellent bloqueur de blitz et a de bonnes mains, ce qui l’aide dans le jeu de passe des Packers (il court toujours mais pour gagner de petites distances). Mughelli a été lâché par les Falcons après une année en IR. Les Bolts se souviendront de l’excellent Lorenzo Neal qui a arrêté en 2009.

Et Denver, finalement ils avaient aussi un Fullback… c’était aussi leur Quarterback. Hum.

Sylvain : Quel est le % de turnover dans les rosters NFL ?
Bien plus qu’avant la free agency en 1993 en tout cas. Avant cette période, faire toute une carrière avec une équipe était beaucoup plus courant qu’aujourd’hui, c’est d’ailleurs ça qui entraîne le fameux dicton « NFL is business » qu’on entend beaucoup. Cependant, la free agency ne vous répare pas une équipe miraculeusement : si vous n’avez pas le talent pour drafter et développer, vous n’allez pas très loin, même avec tous les sous du monde (pas vrai Dan Snyder ?).
Par exemple, entre la fin 2009 et le début de la saison 2011, voilà le top 5 des équipes ayant conservé le moins de joueurs dans leur roster de 53 : Seattle (23), Detroit (28), Washington (29), Denver (29) , Miami (31). Ca ne respire pas le succès absolu hein ? Si on continue d’ailleurs, on rencontre après Jacksonville, Cleveland, Arizona et Saint-Louis.
Au contraire, le top 5 des rosters les plus stables : Atlanta (43), Minnesota (42), New Orleans (41), Tennessee-Chicago-Baltimore-Cincy (39). Un peu plus stable et un peu plus de succès, si on s’arrête avant la saison dernière. Le seul intrus pourrait sembler les Patriots en 18e place (33), mais là c’est plus le système de Belichick qui est performant.
On en arrive à un total de 1071 joueurs qui sont restés à leur endroit, par rapport à 1696 au total (32 équipes à 53 joueurs) donc 625 joueurs qui ont soit changé d’équipe, soit été drafté, soit été non-drafté mais ont gagné leur place, soit ont pris leur retraite. Vu tous les mouvements cette année, ça m’étonnerait que la tendance se calme.

Guickham : Tu as parlé de sanctions concernant une infraction aux CBA des OTA mais peux-tu expliquer quelles sont les clauses d’un tel CBA, les degrés d’infractions pouvant être commis par les équipes et les sanctions correspondantes, quand a-t-il été signé et jusqu’à quelle date est-il valable ?

Les infractions aux règles instaurées sur les OTA sont les suivantes :
  • Première infraction : amendes de 250,000$ pour le coach + 100,000$ pour l’équipe
  • Deuxième infraction : amendes de 500,000$ pour le coach + 250,000$ pour l’équipe + suppression des OTA pour la semaine suivante + 4e tour de draft perdu

Pour info, lors de Spygate, Belichick avait été condamé à 500,000$, les Pats à 250,000$ et la perte du premier tour de draft. Donc s’entraîner quand on n’a pas le droit, c’est presque aussi grave qu’espionner ses adversaires.

Le CBA a été signé après moult délibérations houleuses l’année dernière, et il court jusqu’en 2021. Et soyez heureux, parce qu’il y a une clause qui indique qu’aucune des deux parties (NFL, NFLPA) ne peut sortir du CBA avant son terme. On est donc « tranquille » jusqu’à la draft 2021.


Yacine : Comment peut-on expliquer que la majorité des rookies du 1er tour n’ont pas encore été signé? Il se passe quelque chose en rapport avec le nouveau CBA?

Oui, c’est en rapport avec le nouveau CBA, mais peut-être pas comme tu l’entends, car c’est une conséquence indirecte, et non directe. Dans le nouveau CBA, il y a quelque chose que j’attendais depuis un moment déjà (les anciens du site se rappelleront que j’ai souvent pesté contre) : le plafond des salaires pour les rookies. On avait atteint des sommets de ridicule avec le mirobolant contrat de Sam Bradford en 2010 : 6 ans, 78 millions $ dont 50 millions garantis (cf graphe ci-contre).

Depuis 2011, les rookies ont leur contrats plafonnés en longueur et en salaire. Cela signifie que l’on n’assiste plus à la course à l’échalote entre les équipes à qui signera son rookie le plus vite pour le payer le moins cher possible parce que les autres vont prendre ce salaire-là comme base de négociation. Vous vous souvenez du holdout de Michael Crabtree en 2009 parce qu’il était payé moins que Heyward-Bey qu’il considérait comme inférieur en se basant sur des mocks drafts ? Plus de ça.

Donc les négociations pour les contrats rookies sont très encadrées, ce qui fait que les équipes ne sont pas pressées à les signer. Elles savent déjà environ combien elles vont devoir débourser pour leur premier tour, du coup elles ont plus de temps pour savoir comment elles vont l’intégrer dans leur salary cap, si elles ont besoin de restructurer d’autres contrats, et surtout comment elles vont s’occuper des cas plus épineux.


Richard : J’aurais aimé en savoir plus sur les différentes formations en 4-3, j’entends parler de Cover 1, Cover 2, Cover 3, même de Cover 0 il me semble … Quels sont leurs différences, en existe-il d’autres ?
Allez, encore un peu de tactique défensive, sinon vous allez être perdus :). Déjà, cover est un terme qui n’est pas inhérent à la 4-3, on peut le retrouver avec toutes les défenses possibles et imaginables.

Pour être simple, CoverX (avec X = 0,1,2,3,4,6) indique en combien de zones le terrain profond de la défense est divisée. Pensez-y comme des couloirs d’athlétisme ou de natation : le X indique le nombre de couloirs qui partagent le terrain profond sur la largeur. Explication.

La tactique la plus connue est sans aucun doute la Cover-2. Cela indique tout simplement que le terrain profond dans la défense est divisé en deux couloirs égaux, chacun étant occupé par un Safety. Regardez le schéma ci-contre : en bas vous avez les deux Safeties, chacun couvrant une moitié de terrain en largeur. Les soucis interviennent en général contre le jeu de course (vous n’avez que 7 hommes « dans la boîte », les DL et les LB) et la zone entre les Safeties est fragilisée.

Cover-0 indique qu’on oublie totalement de couvrir la profondeur, et chaque défenseur doit prendre un adversaire homme à homme. Si jamais un des défenseurs est battu par son adversaire, il n’y a donc AUCUNE aide pour lui, et c’est le touchdown en vue.

Cover-1 indique qu’on se retrouve avec un seul Safety en profondeur qui doit couvrir toute la largeur du terrain. A privilégier contre les jeux de course ou les jeux de passes courtes mais fragile contre les passes longues si vous n’avez pas un pass-rush efficace.

Cover-3 est joué en général par 2 Cornerbacks et 1 Safety et divise le terrain en 3 couloirs. Vu que le second Safety joue au niveau des Linebackers, elle est plutôt utilisée pour contrer le jeu de course et les passes longues (Cornerbacks en homme-à-homme). Cependant justement à cause du fait que les Cornerbacks ont la responsabilité de couvrir 1/3 du terrain en profondeur, ils ont tendance à reculer rapidement, ce qui fait qu’ils sont vulnérables contre les passes courtes. 

Cover-4 ou Quarters Defense divise le terrain en 4 couloirs pour les jeux de passe évidents. Attention aux feintes, vous êtes complètement à poil contre le jeu de course.

Enfin Cover-6 est un croisement génétique né des défenses 3-4 car vous avez :

  • Un Boundary Safety qui couvre une moitié de terrain (comme dans une Cover-2),
  • Un Field Cornerback et un Field Safety qui couvrent l’autre moitié d’un terrain (comme dans une Cover-4).

D’où le nom, Cover-2 + Cover-4 = Cover-6. Le Field Safety est alors libre de réagir à l’action (course, il fonce, passe il recule).


Mahen : Pour moi les proprios NFL ont une place prépondérante dans la réussite ou les échecs d’une franchise. Quels sont les bons élèves et les mauvais concernant les proprios?
Un peu que les propriétaires ont une place prépondérante dans la réussite d’une franchise, tout part d’eux. De plus certains sont très impliqués dans les décisions du club, pouvant aller jusqu’à nommer le coach eux-mêmes (on se souvient de l’arrivée de Jerry Jones qui a amené Jimmy Johnson chez les Cowboys). Faire un topo sur chaque propriétaire serait un peu long pour le mailbag, mais un très bon sujet d’article que je me mets sous le coude :p. Ici je vais me contenter que des meilleurs et des pires.

Les Rooney

Si on cherche les proprios qui ont eu du succès sur le terrain et qui ont su amener les sousous dans leur franchise, c’est difficile de faire mieux que les Rooney (Steelers), les Mara (Giants), Robert Kraft (Patriots), Jim Irsay (Colts), Steve Bisciotti (Ravens), Pat Bowlen (Broncos) ou Jerry Jones (Cowboys), même si les deux derniers ont manqué de résultats ces derniers temps, ils étaient déjà là pendant les périodes Elway et Aikman.

De l’autre côté, on a les mauvais élèves : Randy Lerner (Browns)Dan « Anti-Picsou » Snyder (Redskins), Stephen « Personne veut venir chez moi » Ross (Miami), Mike Brown (Bengals) ou William Clay Ford Sr (Lions), même si encore une fois les deux derniers méritent une astérisque si leur franchise continue leur redressement. En tout cas Ford a du boulot pour faire oublier que c’est le seul à ne pas avoir vu la nullité absolue de Matt Millen en GM. Stan Kroenke (Saint-Louis) et Bill Bidwill (Arizona) sont sauvés de la liste par un seul et même homme : Kurt Warner qui a amené les deux franchises aux SB, sinon ils ne seraient pas loin du compte.

Enfin on a les cas exceptionnels, Green Bay et Oakland. Les Packers sont possédés par 112,158 quidams comme vous et moi, et c’est Mark Murphy, le président, qui fait office de tête de l’organisation. Lui et son prédécesseur Bob Harlan sont à mettre dans les très bon « proprios ». Et puis on a Al Davis qui a connu les deux extrêmes : figure de proue à ses débuts et tête de turc préféré des fans de NFL partout dans le monde à la fin. Visiblement, son fils Mark (ou quiconque servait d’intérimaire) n’est pas mieux quand on voit le deal pour Carson Palmer.


BenJi : Pensez vous que la blessure de Terrell Suggs va compromettre les chances des Ravens pour atteindre le Superbowl, voire même les PO ?
Le poids qui pesait sur les épaules de Courtney Upshaw vient de s’alourdir un peu plus. C’est sans nul doute une perte terrible pour Baltimore, car Ngata et Suggs sont les nouveaux fers de lance de la défense. Cependant, je ne pense pas que la perte de T-Sizzle soit totalement rédhibitoire concernant les playoffs (le Superbowl c’est peut-être déjà plus difficile).
Les Ravens ont deux choses qui les sauvent dans ce genre de situation : la tradition défensive et la draft. Les équipes avec une philosophie de jeu établie de longue date savent se bâtir par la draft et ne sont pas démolies par la perte d’une seule star. L’histoire des Ravens et la présence d’Ozzie Newsome en GM prouvent que Baltimore fait partie de ces équipes-là. De ce fait, la franchise va demander plus à des jeunes joueurs comme Pernell McPhee, Sergio Kindle ou Paul Kruger (photo) qui peuvent répondre présents. Et si jamais la défense des Ravens maintient un niveau acceptable, ce sera une petite indication pour l’après-Ray Lewis (même si les deux ne jouent pas au même poste).
Maintenant, deux choses sont sûres : la pression vient également d’augmenter sur l’attaque (Joe Flacco en particulier), et il est sûr que l’AFC North entière a respiré un bon coup quand ils ont appris la nouvelle. Ca ouvre pas mal de possibilités dans cette division, mais je ne pense pas que ce soit la fin du monde pour les Corbacs.

C’est la fin de ce mailbag. N’hésitez pas à continuer à envoyer des questions, elles seront toutes lues (l’adresse se trouve dans la news d’annonce linkée tout en haut de l’article).

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