Vince Lombardi Tribute

Fait par Kuro

« Un soir, notre père est rentré et nous a déclaré : ‘J’ai une grande nouvelle : nous déménageons à Green Bay, Wisconsin’. Ma seule réaction a été : ‘c’est où, le Wisconsin ?’. Alors le lendemain, il a rapporté une carte et il a dit : ‘Voilà l’état du Wisconsin’. Il l’a regardée avec nous et il a fini par dire : ‘Green Bay n’est pas sur la carte…’ Je lui ai alors annoncé : ‘Hors de question que je déménage dans un endroit qui n’est pas sur une carte !’. Mon père a répondu : ‘Quand j’aurais fini, Green Bay sera sur la carte, et toi, Susan, tu sauras exactement où tu habites’. »

Susan Lombardi, fille de Vince Lombardi, sur l’annonce du déménagement de la famille à Green Bay.

Une fois qu’il eut fini à Green Bay, non seulement tout le monde savait où était la petite ville de 100,000 âmes, mais tout le monde savait qui était Vince Lombardi. Ce 3 septembre marque le 41e anniversaire de la mort du coach légendaire.

Vincent Thomas Lombardi naît le 11 Juin 1913 à New York, l’aîné de cinq enfants. Très tôt, son père lui inculque deux notions essentielles dans la vie : le travail et l’église. Cela marque tellement le jeune Vince qu’il décide de devenir prêtre et il rentre dans un lycée pour cela. Mais au milieu de son internat, une autre passion finit par prendre le dessus : le football américain.

Il décide finalement de changer de lycée, puis d’aller à l’Université de Fordham où, malgré sa mauvaise vision, il entre dans l’équipe de foot US comme Right Guard. Mais Vince rencontre alors un autre problème : il est discriminé pour ses origines italiennes (il a même été suspendu quelques jours après une bagarre à cause de cela). Lombardi persévère et devient une partie du « Seven Blocks of Granite », la fameuse ligne offensive de Fordham.

A sa sortie de l’université en 1937, Lombardi passe de petit boulot en petit boulot, balloté dans la Grande Dépression qui secoue l’Amérique. Il finit par trouver une place de coach assistant au lycée St Cecilia en 1939 où, en plus d’enseigner le football (et le basket), il officie comme professeur de physique/chimie et de latin. Sur le terrain, il permet au lycée de vaincre des adversaires avec 10 fois plus de joueurs, car il est capable de tirer le meilleur de chacun de ses joueurs.

Lombardi revient à Fordham comme assistant en 1947, puis il intègre l’équipe de West Point (US Army) en 1949, assistant du coach légendaire Red Blaik. Sous ses ordres, Lombardi apprend la discipline et l’attention au détail (notamment par l’étude de films). Il reste 5 ans puis il recherche absolument à atteindre la prochaine étape : un job de Head Coach; cela malgré le fait qu’on lui dit qu’aucune équipe n’engagera de coach « dont le nom se termine par une voyelle » (sous-entendu, un fils d’immigré).

Pendant ce temps, Wellington Mara, ancien camarade de classe de Lombardi et fils du propriétaire des Giants de New York, recherche un Coach pour l’équipe. Mais les Giants veulent Red Blaik, lequel refuse avant de conseiller à New York de prendre Lombardi comme Offensive Coach. Ce n’est toujours pas la position rêvée par Lombardi, mais il accepte pour entrer dans le monde des professionnels (et surtout, revenir dans sa ville natale).

Après des débuts difficiles, Lombardi finit par imposer son style et avec l’aide de Tom Landry arrivé en Defensive Coach, les Giants gagnent le titre en 1956. Ses entraînements durs et physiques et ses grandes qualités en pédagogie/psychologie l’imposent comme un grand assistant. En 1958, il pense enfin qu’il a mérité d’avoir sa chance pour devenir Head Coach. Jim Lee Howell, le HC des Giants, lui écrit des lettres de recommendations pour plusieurs équipes (pro et universitaire), mais Lombardi subit encore une discrimination envers ses origines.

Une équipe va cependant prendre le risque. La plus petite ville de la NFL, siège d’une des plus anciennes franchises, décide d’engager Lombardi pour tenter de rebooster une équipe qui est tombé dans les abysses (record de 1-10-1 en 1958). Lombardi débarque alors, début 1959, à Green Bay, Wisconsin, comme Head Coach, une position qu’il convoite depuis 20 ans. 20 ans de frustrations et de discrimination.

Lors d’un de ses premiers speechs, Lombardi déclare : « Nous allons poursuivre la perfection sans relâche, en sachant que nous ne l’atteindrons pas, car rien n’est parfait. Mais nous allons poursuivre la perfection sans relâche, car ce faisant, nous atteindrons l’excellence ». Il applique de suite les mêmes méthodes drastiques d’entraînement et la même psychologie que dans ses anciens postes. Il tire le meilleur parti de ses joueurs, qui bouclent la saison à 7-5 (première saison positive depuis 11 ans). 1960 est encore meilleure, et Green Bay, avec les mêmes joueurs que ceux ayant fini 1-10-1, atteint la finale NFL. Les Packers échouent pour quelques yards contre les Philadelphia Eagles, ce qui pousse Lombardi à déclarer à ses joueurs que cela n’arrivera plus jamais.

Les deux années suivantes, 1961 et 1962, les Packers remportent le titre NFL deux fois de suite contre les Giants. Et tout cela est possible grâce à une action : le « Power Sweep ». C’est une course dans laquelle la ligne se détache sur un côté pour ouvrir une voie au coureur. Cette tactique demande précision, travail d’équipe et ajustement à la volée, et elle devient la marque de fabrique de Green Bay. Avec cette action réalisée à la perfection par l’attaque, les Packers écrasent la ligue de leur talent.

Mais la machine s’enraye en 1963 et 1964 avec des places de deuxième de division. Or, comme Lombardi le dit lui-même : « il n’y a pas de place pour être second. Il n’y a qu’une place dans mon jeu, et c’est la première ». Il est donc de plus en plus obsédé par la victoire et rongé par les échecs, car étant perfectionniste, il ne peut tolérer la défaite. De ce fait, l’ambiance dans l’équipe et dans sa propre famille se détériore.

Mais sa persévérance et le lien très fort qu’il créé avec ses joueurs permet à l’équipe de redresser la tête, et de remporter le titre à nouveau en 1965 contre les Browns. En 1966, le Superbowl est établi, et Lombardi met un point d’honneur à représenter la NFL contre l’AFL. Les Packers arrive au Superbowl I et le remportent contre les Raiders. En 1966, les Packers retrouvent les Cowboys de Dallas pour la finale NFL dans le fameux « Ice Bowl ». Les Packers l’emportent à la dernière seconde grâce à un QB sneak de Bart Starr, et ils s’en vont remporter une troisième titre de suite contre les Chiefs au Superbowl II.

A la suite de ce triomphe, Lombardi se sent totalement épuisé par sa poursuite incessante de la victoire. Il est sans cesse attaqué par des ulcères (ayant refusé de se soigner), mais surtout moralement et physiquement, la pression énorme qu’il s’est mise (sur lui comme sur son entourage) l’a usé. Il se retire du poste de Head Coach, mais il conserve son poste de General Manager. En son honneur, la rue dans laquelle se trouve Lambeau Field est renommée Lombardi Avenue.

Malheureusement, on ne change pas si facilement, et Lombardi se rend compte avec le temps qu’il a fait une énorme erreur, car il n’a plus ce même lien avec ses joueurs sur le terrain. Déprimé, il erre sur le gridiron lors des entraînements de son équipe, sans pouvoir dire quoi que ce soit car c’est le rôle du Head Coach. Et Vince Lombardi EST un Head Coach, et l’a toujours été. C’est pour ça qu’il va prendre une grave décision trois ans plus tard.

En 1969, Lombardi part coacher les Redskins de Washington, dans une décision que beaucoup n’ont pas comprise à Green Bay. Les Reds sont comme les Packers à l’arrivée de Lombardi : un fantôme qui n’a pas eu de saisons positives depuis 14 ans. Se retrouvant dans son élément, Lombardi et le QB Sonny Jurgensen mènent les Redskins à un record de 7-5-2.

Ce sera la seule saison de Lombardi avec les Redskins, car le coach est rattrapé par ses problèmes médicaux qu’il n’a pas voulu traiter avant. En juin 1970, un premier examen révèle que Lombardi a un cancer au côlon. Il est opéré, mais en juillet, un second examen prouve que le cancer est terminal. Lombardi est alors admis à l’hôpital, et, son heure étant proche, un cortège de joueurs et de personnalités vient lui rendre visite pour lui dire au revoir.

Vincent Thomas Lombardi s’éteint le 3 Septembre 1970, à l’âge de 57 ans. Le jour de son enterrement, des centaines et des centaines de gens sortent dans la rue au passage du corbillard. En son honneur, une statue à son effigie est érigée devant Lambeau Field, et trois mois après sa mort, le trophée du Superbowl est renommé en son nom : le « Vince Lombardi Trophy ».

Depuis, à chaque fois que l’équipe triomphante soulève ce trophée à l’issue de la finale d’une saison acharnée, c’est comme si on entendait résonner la voix forte du coach légendaire : « Gagner n’est pas tout, c’est la seule chose qui compte. »

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