Match de Légende : The Fake Spike

FakeSpike-TD

 

La présentation

 

Match  Miami Dolphins @ New York Jets
Lieu Giants Stadium
Date 27 Novembre 1994
Occasion Week 13

 

La situation

 

Les Dolphins de Miami et les Jets de New York se connaissent depuis l’époque de l’AFL, et la confrontation a tourné en rivalité assez rapidement. Après une domination totale des Jets dans l’ancienne ligue, la réunion de la NFL et de l’AFL a vu les Dolphins dominer pendant les années 1970 et 1980.

Il faut dire que les Dolphins, toujours sous la férule de Don Shula, ont choisi le prolifique Quarterback Dan Marino dans la fameuse draft de 1983, alors que New York s’est rabattu sur Ken O’Brien; certes un bon QB, mais qui n’est pas du même niveau. Les deux avaient d’ailleurs allumé les feux d’artifices en 1986 dans une rencontre hallucinante remportée 51-45 par les Jets en prolongations, avec 884 yards net à la passe et 10 touchdowns (records de l’époque). Depuis, les Jets ont changé pour l’ancien Bengal, le gaucher Boomer Esiason (photo).

FakeSpike-EsiasonC’est donc l’heure d’un nouveau chapitre dans la rivalité entre les deux franchises. Miami (7-4) est en tête de la division AFC East avec une victoire d’avance sur New York (6-5), la victoire obtenue lors du match aller 28-14. Les Jets du coach Pete Carroll comptent bien revenir à égalité.

 

Le match

 

QUART-TEMPS 1

 

Les Jets mettent immédiatement la pression sur Marino au début du match, et le premier drive des Dolphins ne donne rien; ça va être la norme pendant la plupart du match. Esiason a plus de réussite, parvenant à contrebalancer plusieurs courses à perte avec ses passes pour les receveurs Art Monk ou Rob Moore. Cependant, les Dolphins font de la résistance aux abords de leur en-but, et ce premier drive se conclut sur un Field Goal de 24 yards de Nick Lowery.

Miami 0 – New York 3

Le deuxième drive des Dolphins commence mieux avec une passe de 25 yards de Marino pour Irving Fryar, mais le lancer suivant arrive droit dans les mains du Cornerback James Hasty. Esiason repart au travail, avalant les yards à la passe; le 1er quart-temps se termine alors que les Jets sont en 3e&1.

 

QUART-TEMPS 2

 

La 3e tentative échoue et Pete Carroll décide de jouer la 4e, contrairement au premier drive. Esiason recule sous la pression et lance une passe très courte pour son receveur James Thornton qui doit plonger hors de l’en-but pour la rattraper. Il n’a pas le temps de se relever pour y retourner; il est touché au sol par le Defensive Tackle Tim Bowens. Les Jets n’obtiennent donc aucun point de l’interception.

FakeSpike-ThorntonShortMais cette situation n’arrange pas Miami, qui se retrouve à un yard de son propre en-but; sans surprise l’équipe floridienne se dégage au bout de 3 actions. Les Jets calent ensuite sur les 32 yards des Dolphins et Carroll décide une nouvelle fois de jouer une 4e tentative; la passe d’Esiason est trop haute pour Ricky Anderson. New York rend la balle à Miami mais va vite la récupérer : 3 actions plus tard une tentative de bombe de Marino est interceptée par le Safety Brian Washington. Cette fois Esiason ne laisse pas passer l’occasion et il réussit une passe de touchdown de 30 yards pour le Tight End Johnny Mitchell.

Miami 0 – New York 10

Marino trouve enfin un peu d’élan dans le drive suivant, Shula se reposant sur son bras pour remonter le terrain. Malheureusement, alors que les Dolphins sont à moins de 10 yards de l’en-but des Jets, le coureur Bernie Parmalee perd la balle qui est récupérée par Washington (encore lui). Les Jets laissent ensuite tourner le chrono et la mi-temps s’achève sur ce score de 10-0 pour New York; Miami n’arrive à rien en attaque.

 

QUART-TEMPS 3

 

La seconde mi-temps continue sur le rythme de la première : sur la deuxième action des Jets, Esiason vise Monk qui est bien marqué par le Cornerback Troy Vincent. La balle passe entre les mains du défenseur et termine dans celles du receveur; grâce à deux bons blocks de ses partenaires, il gagne 69 yards. Le coureur Brad Baxter conclut en marquant un touchdown de 3 yards pour amener l’écart à 17 points.

Miami 0 – New York 17

Il devient urgent pour les Dolphins de revenir d’un drive avec des points, et c’est ce qu’ils parviennent enfin à faire grâce à la maestria de Marino; Mark Ingram se bat pour marquer un touchdown de 10 yards à la réception. A la surprise générale, Shula demande une conversion à deux points, mais elle échoue. Les « Fins » sont enfin sur le tableau d’affichage, cependant ils ont besoin d’un coup de main de la défense.

Miami 6 – New York 17

C’est peine perdue : la défense continue d’être disséquée par Esiason, et après une passe de 28 yards à Moore, c’est Mitchell qui marque un second touchdown à la réception de 14 yards.

Miami 6 – New York 24

Au moins, les Dolphins ont trouvé leur rythme offensif, et Marino conduit un nouveau beau drive. Juste avant la fin du 3e quart-temps, Ingram réussit deux réceptions consécutives : la première aberrante en jonglant le ballon et la seconde pour un touchdown de 17 yards.

FakeSpike-IngramJuggleMarino et Fryar s’occupent de la conversion à 2 points, et Miami reste dans la rencontre.

Miami 14 – New York 24

 

QUART-TEMPS 4

 

La dernière période démarre par un drive des Jets où, encore une fois, Esiason trouve les failles dans la défense des visiteurs… jusqu’à ce que Troy Vincent se rachète de son interception ratée au 2e quart-temps en récupérant la passe du Quarterback. Marino repart de ses 37 yards, et la défense des Jets commence à reculer en ayant peur du gros jeu. Cela ne fait pas peur à Marino qui prend ce qu’on lui laisse avant d’envoyer une passe de touchdown de 28 yards pour Ingram.

Miami 21 – New York 24

Une série d’erreurs intervient ensuite : la défense de Miami, enfin réveillée, provoque trois fumbles successifs d’Esiason qui sont récupérés par New York. Les Jets doivent se dégager, mais c’est au tour du returner OJ McDuffie de perdre le cuir sur un fumble. Enfin, Esiason rend la balle à Miami en lançant une interception en double couverture; le Cornerback J.B. Brown redonne de l’espoir aux fans des Dauphins. Marino reprend le contrôle du ballon sur ses 17 yards avec 4:51 à jouer.

Une 4e tentative donne lieu à une argumentation à distance entre Marino et Shula : Marino veut la jouer, Shula veut envoyer le punter. Shula finit par avoir le dernier mot et Miami rend la balle à New York, non sans une frayeur quand le retourneur Cliff Hicks décide de prendre la balle avec deux joueurs sur le dos : il perd le ballon qui, heureusement pour lui, roule en dehors des limites du terrain. Les Jets tentent logiquement de manger l’horloge, mais ils n’arrivent pas à gagner un seul First Down; ils rendent de ce fait la balle à Miami sur leurs 16 yards avec 2:34 restantes.

Marino trouve d’abord Fryar pour 18 yards avant de se connecter avec Mike Williams pour 6 yards. Après une passe incomplète, il trouve Keith Jackson pour 10 yards puis Williams à nouveau pour 21 yards. Sur les 28 yards des Jets, Marino trouve Ingram qui se bat pour gagner 9 yards alors qu’il reste 50 secondes. Une nouvelle passe laser pour Ingram amène Miami sur les 8 yards des Jets.

 

L’action

 

Il reste 38 secondes quand Ingram est plaqué, et Marino court en faisant à multiples reprises un signe bien connu : celui du spike, indiquant qu’il va jeter le ballon au sol pour arrêter l’horloge au prix d’une tentative.FakeSpike-Clock

Il accompagne d’ailleurs ce geste en criant de manière répétée :

Clock ! Clock ! Clock !

…soit « [il faut arrêter] l’horloge ! ».

Il reste 25 secondes quand Marino se met en position; tout le monde dans le stade (et à la télévision) a vu le geste. Puisque c’est un spike, les défenseurs de New York savent que cela ne sert à rien de foncer sur Marino, et ils se relâchent… sauf que c’est une feinte : Marino ne fait pas de spike, se tourne sur sa droite et envoie une passe de touchdown à Mark Ingram.

En effet, absolument rien n’interdit au Quarterback de faire signe qu’il va faire un spike, mais de ne pas le faire. De plus, vu le score, la position sur le terrain et le temps restant, le spike est la chose logique à faire, et c’est justement là-dessus que comptait Marino. Les Jets ont littéralement mordu dans la feinte et seuls deux défenseurs ont réagi : le Defensive Tackle Paul Frase est arrivé trop tard sur Marino, et le Cornerback Aaron Glenn a été battu en un-contre-un par la route d’Ingram. On peut voir, sur l’image-titre, que tous les joueurs sont relevés.

La transformation passe, donnant l’avantage aux Dolphins pour la première fois du match.

Miami 28 – New York 24

 

Les conséquences

 

Les Jets remontent jusqu’aux 35 yards des Dolphins, mais une dernière passe d’Esiason trop longue survole l’en-but. Miami remporte le match grâce à 28 points en seconde mi-temps.

MIAMI 28 – New York 24

La feinte de Marino devient légendaire car c’est la première fois qu’elle est utilisée, de plus pour la victoire au bout d’un retour fracassant dans un match tendu entre des rivaux historiques. Les cris répétés de Marino juste avant le spike ont donné un autre surnom à cette action : The Clock Play.

Mais surtout, ce qui rend cette action tellement importante, c’est qu’elle marque le début d’une série complètement noire pour les Jets : ils commencent par perdre les 4 matchs restants dans la saison, terminant à 6-10. Pete Carroll est renvoyé puis remplacé par Rich Kotite qui est d’une incompétence notoire : les Jets vont tomber au fond du trou avec des records de 3-13 en 1995 et 1-15 en 1996. Si vous calculez, cela donne donc un record cumulé de 4-33 à partir du Fake Spike (au bout du bout, les Jets vont faire appel au légendaire Bill Parcells, qui va les redresser comme il sait le faire).

Les Dolphins, eux, finissent en tête de la division et perdront en Divisional Round contre des Chargers sortis de nulle part qui iront jusqu’au Super Bowl.

Depuis Marino, on a vu quelques occurrences du Fake Spike dans d’autres matchs, mais aucun n’a eu la portée de celui réalisé par le #13 des Dolphins.

 

La box score

 

Equipes QT1 QT2 QT3 QT4 Final
Miami Dolphins 0 0 14 14 28
New York Jets 3 7 14 0 24