Fiche Légende : Y.A. Tittle

#63,64,14 – Quarterback

 

 

Présentation

 

GENERALITÉS
Nom complet Yelberton Abraham « Y.A. » Tittle Junior
Date de Naissance 24 Octobre 1926
Lieu de Naissance Marshall, Texas
Date de Décès 8 Octobre 2017
Lieu de Décès Atherton, Californie
CARRIÈRE
Lycée Marshall, Texas
Université LSU
Draft 1er tour de 1948 (#6)
Équipes Joueur :
Baltimore Colts (1948-1950)
San Francisco 49ers (1951-1960)
New York Giants (1961-1964)
Statistiques 17 saisons
204 matchs – 152 comme titulaire
55.2% de complétion
33070 yards
242 touchdowns / 248 interceptions
372 courses / 1245 yards (3.3)
39 touchdowns
HONNEURS
Pro-Bowls 7 (1953, 1954, 1957, 1959, 1961-1963)
All-Pro 4 (1957, 1961-1963)
Performances notables Multiple recordman pour un Quarterback en carrière
Recordman de touchdowns à la passe en un match (7)
1963 MVP
3 fois leader en touchdowns à la passe
(1955, 1962, 1963)
Leader en QB rating (1963)
Récompenses Membre du Hall Of Fame des 49ers
Membre du Hall Of Fame des Giants
Numéro #14 retiré par les Giants
Hall Of Fame Classe de 1971

 

Biographie

 

Lorsqu’on parle de Y.A. Tittle, la première chose qui vient à l’esprit des connaisseurs est cette photo mythique du joueur, dans sa 17e et dernière saison NFL, sans casque, agenouillé, en sang, avec une commotion et un sternum fissuré suite à une interception remontée pour un touchdown par les Pittsburgh Steelers ; l’image du vieux guerrier vaincu. En fait, ce cliché pris par Morris Berman du Pittsburgh Post-Gazette n’avait pas été publié originellement par le journal qui désirait des photos d’actions – c’est un concours de photographie qui lui donnera ses lettres de noblesse. Mais Tittle a légué une autre chose à la postérité… et à un autre sport : c’est lui qui, avec l’aide de son receveur R.C. Owens, a inventé le terme alley-oop qui a été repris ensuite au basket pour signifier cette passe en hauteur reprise « de volée » par un partenaire !

Yelberton Abraham Tittle Jr. naît en octobre 1926 à Marshall, dans l’état du Texas. En grandissant, il se passionne pour le football ; son idole est un autre texan d’origine, le mythique Quarterback des Washington Redskins Slingin’ Sammy Baugh. Véritable magicien de la passe vers l’avant, Baugh révolutionne la NFL à une époque où la ligue en est encore majoritairement à courir ; une stratégie résumée dans le fameux proverbe « trois yards et un nuage de poussière ». Ayant vu son modèle s’entraîner en lançant la balle à travers un pneu attaché à une branche d’arbre, le jeune Tittle s’exerce de la même façon en espérant, un jour, atteindre le même niveau que le légendaire lanceur. Il passe ainsi des heures à parfaire sa précision, mais ce n’est pas la seule aide qu’il reçoit : son grand frère Jack, qui jouera dans l’équipe de l’Université de Tulane, lui sert également de partenaire.

Naturellement, quand il entre au lycée de Marshall, Y.A. s’inscrit dans l’équipe de football. Il finit son cursus en 1944 et reçoit des offres principalement de la part de deux Universités : Texas et Louisiana State ; ce n’est pas une surprise car la ville de Marshall est à la frontière entre les deux états, et l’impact de Jack Tittle à Tulane a poussé les universités de Louisiane à s’intéresser au petit frère. Tittle décide de jouer pour les Tigers de LSU, quittant son état natal ; il rejoint l’équipe entraînée par Bernie Moore. Son asthme l’exempte de participer à la Seconde Guerre Mondiale, et avec les forces vives américaines qui sont drainées par le conflit, il a l’opportunité de jouer dès sa première année universitaire. Il est aligné comme coureur dans la formation single wing avant d’être déplacé comme Quarterback la saison suivante quand l’équipe change de stratégie offensive pour adopter la fameuse formation T.

Détestant son prénom complet (et une calvitie naissante déjà à son âge), il commence à se faire appeler Y.A. et devient une redoutable arme capable de jouer en attaque et en défense. Il est nommé par deux fois All-Southeastern Conference (SEC) au poste, et il permet même à LSU de se qualifier pour le Cotton Bowl de 1947, sa dernière année : un match nul 0-0 contre Arkansas dans un température polaire ; Tittle partage le titre de MVP du match. C’est un souvenir plus glorieux que ce match contre Ole Miss où, après avoir intercepté une passe du Quarterback Charlie Conerly, il est empêché de marquer par… son propre pantalon qui lui tombe sur les chevilles parce qu’un adversaire lui a arraché sa ceinture ; le Field Goal suivant est raté, causant la défaite 20-18 de LSU. Cette anecdote est doublement intéressante, car ce ne sera pas la dernière rencontre « problématique » entre Tittle et Conerly.

A sa sortie de l’université, il intègre la draft NFL de 1948 ; son talent le précède et il est sélectionné en #6 par les Detroit Lions. Cependant, il va décider de bifurquer : il préfère démarrer sa carrière professionnelle sur la côte Est et rejoint les Baltimore Colts de la ligue concurrente, l’All-American Football Conference (une équipe différente des Baltimore Colts de NFL qui déménageront à Indianapolis). L’équipe est entraînée par l’ancien grand Quarterback des Green Bay Packers Cecil Isbell, et ce dernier prend Tittle sous son aile. Il lui permet d’améliorer encore sa technique : le jeune lanceur accumule 2522 yards, 16 touchdowns et 9 interceptions, sans oublier 4 touchdowns à la course ; cela lui permet d’être nommé rookie de l’année dans l’AAFC.

L’année 1949 est un peu plus compliquée, autant sur le plan personnel que sur le plan collectif : les Colts postent une terrible saison à 1-11, mais on ne sait comment ils parviennent à survivre à la fusion entre l’AAFC et la NFL, rejoignant la grande ligue avec les San Francisco 49ers et les Cleveland Browns. Cela va être de courte durée : Tittle et les Colts font une nouvelle saison terrible à 1-11 et l’équipe disparaît.

Plutôt que de laisser les joueurs des Colts dans la nature, la NFL leur permet d’être de nouveau éligibles pour la draft de 1951. De nouveau, le talent de Tittle va lui permettre d’être rapidement choisi : il est sélectionné en #3 par les San Francisco 49ers, une autre des franchises de l’AAFC qui connaissait tout de son potentiel. Il se retrouve remplaçant de Frankie Albert, un pionnier qui a été le premier Quarterback universitaire de la formation T ; autrement dit, un prédécesseur de Tittle. Après deux saisons, Albert décide de partir en CFL et le jeune lanceur, qui a trouvé un peu de temps de jeu, devient titulaire.

C’est le véritable début de la carrière professionnelle du chauve : avec, entre autres, l’aide des futurs Hall Of Famers coureurs Joe Perry et Hugh McElhenny, il lance pour 2121 yards et 20 touchdowns à 57.5% de complétion (un très bon taux pour l’époque) et score 6 touchdowns au sol ; cela permet aux 49ers de faire une belle saison à 9-3 et au Quarterback d’être nommé à son premier Pro-Bowl. 1954 promet d’être encore plus réussie : San Francisco drafte un autre coureur et futur Hall Of Famer, John Henry Johnson ; les 49ers ont désormais quatre talents exceptionnels en attaque, un carré d’as surnommé le Million Dollar Backfield (pour sa valeur sportive et non financière). Le lanceur décroche un autre vote Pro-Bowl et devient même le premier joueur de football professionnel à apparaître à la couverture du renommé magazine sportif Sports Illustrated, mais les blessures empêchent l’équipe de connaître le succès.

Tittle réussit la performance de mener la ligue en touchdowns (17) et en interceptions (28) en 1955, avant de voir une figure familière revenir : Frankie Albert est nommé Head Coach des 49ers en 1956, pour une nouvelle saison moyenne. En 1957, le géant receveur Raleigh Climon « R.C. » Owens arrive dans l’équipe : il mesure 1m91, une taille rarement vue pour l’époque. Tittle et lui décident d’utiliser cette caractéristique à leur avantage : le Quarterback lance une passe si haute que seule Owens peut l’attraper, à la manière d’un rebond au basket, battant ainsi n’importe quelle couverture ; c’est le lanceur qui décide de l’appeler l’alley-oop en référence à un personnage populaire de bande dessinée, et ce terme sera ensuite repris au basket pour dénommer une action similaire.

Cette technique fait des ravages : Tittle complète 63.1% de ses passes, lance pour 2157 yards et 13 touchdowns, court pour 6 touchdowns et les 49ers finissent à 8-4, parvenant enfin à se qualifier en playoffs. Ils mènent même 27-7 contre Detroit dans le troisième quart-temps, mais les Lions réussissent un incroyable retour pour l’emporter 31-27. Malgré son premier vote All-Pro et son troisième vote Pro-Bowl, c’est la première désillusion de Tittle en playoffs.

Sa saison 1958 est écourtée à cause d’une blessure au genou, et de plus le sophomore John Brodie, drafté l’année dernière, commence à le pousser gentiment vers la sortie. Si Tittle revient en forme et remporte un autre vote Pro-Bowl en 1959, Brodie gagne de plus en plus de temps de jeu. Pour ne rien arranger, le nouveau Head Coach Red Hickey est un adepte de la formation shotgun, avec un Quarterback reculé qui doit être capable de bouger ; à 34 ans, le lanceur chauve ne peut soutenir la comparaison avec son jeune camarade.

Son temps de jeu continue de diminuer en 1960, et son sort semble scellé dès la draft 1961 : les 49ers sélectionnent en premier choix Billy Kilmer, un Quarterback coureur encore meilleur que Brodie. Peu après, Tittle apprend qu’il a été échangé chez les New York Giants contre le jeune Guard Lou Cordileone ; ce dernier est tellement surpris qu’il déclare ne pas comprendre pourquoi un 12e choix de la draft 1960 (lui) a été échangé pour un Quarterback de 42 ans (alors qu’il en a 34).

Il est vrai que la décision semble surprenante, mais ce n’est pas une nouveauté dans la Grosse Pomme : le Quarterback titulaire des Giants a 40 ans, et Tittle l’a déjà croisé puisque ce n’est autre que Charlie Conerly. L’arrivée d’un nouveau lanceur se passe très mal : l’équipe est entièrement soudée autour de Conerly qui est là depuis 1948 et qui a mené l’équipe à trois finales dont une gagnée en 1956. Il n’y a qu’une manière pour « l’intrus » de prouver sa valeur : sur le terrain. C’est ce qu’il va faire petit à petit pendant la saison 1961 : il gagne le respect de ses partenaires et la place de titulaire au cours de la saison, lançant pour 2272 yards et 17 touchdowns + 3 touchdowns au sol. Le has-been permet aux Giants de retourner en finale NFL, mais malheureusement ils sont éreintés 37-0 par les Packers de Vince Lombardi.

Et ce n’est pas fini. Ayant visiblement trouvé la fontaine de jouvence, le Quarterback est inarrêtable en 1962 : il établit un nouveau record NFL avec 33 passes de touchdown dans une saison, et égale un record NFL avec 7 passes de touchdown dans un seul match contre Washington ; cela lui vaut un double vote Pro-Bowl/All-Pro… mais pas de titre NFL : encore une fois, les Packers se dressent devant les Giants et l’emportent en finale, 16-7.

Toujours actif à 37 ans, Tittle ne désespère pas et fait tout simplement la meilleure saison de sa carrière en 1963 : il mène la ligue avec 60.2% de complétion, dépasse encore 3000 yards (3145) et améliore son propre record avec 36 passes de touchdown. Cela permet aux Giants d’accéder à une troisième finale consécutive, et cette fois ce sont les Chicago Bears qui sont en face. Le match va malheureusement basculer sur un plaquage qui blesse le Quarterback ; un ligament rompu dans le genou empêche Tittle d’être à 100%, et Chicago l’emporte 14-10. Mais c’est exactement pour ce genre de choses qu’il était connu : sa résilience et sa capacité à jouer malgré les blessures.

C’est cela, plus l’âge, qui vont rattraper Y.A. et toute l’équipe des Giants : elle termine 2-10-2, le pire bilan de son histoire, bien loin des fastes des années précédentes. L’image qui résume cette saison est celle prise lors du deuxième match de la saison, contre Pittsburgh : après une interception, Tittle est percuté violemment par le Defensive End John Baker ; il se retrouve dans l’en-but, à genoux, sans casque, en sang, avec une commotion et un sternum fissuré ; la fameuse photo prise par Berman. Cela ne va pas l’empêcher de jouer plusieurs matchs ensuite avant de finir la saison sur le banc.

Y.A. Tittle sait que la NFL n’est plus pour lui, même s’il aimerait continuer. Dans un raccourci étonnant du Destin, deux événements très proches interviennent le 22 janvier 1965 à New York : Tittle annonce sa retraite chez les Giants alors qu’un sémillant jeune Quarterback arraché par l’AFL à la NFL, au prix d’une terrible guerre financière, fait sa première conférence de presse chez les Jets ; c’est le futur Hall Of Famer Joe Namath. Ce dernier réussira, quatre ans plus tard, ce que Tittle n’a jamais fait : ramener un titre dans la Grosse Pomme. En effet, cela restera le gros regret de Y.A. : malgré un talent extraordinaire et trois finales, il n’aura jamais gagné un seul titre dans toute sa carrière de footballeur, que ce soit au lycée, en université, en AAFC ou en NFL.

Le Bald Eagle, surnommé ainsi pour sa calvitie et en référence à l’animal symbole des États-Unis, se retire avec les principaux records d’un Quarterback en carrière : 2118 passes réussies sur 3817 tentées pour 28339 yards et 242 touchdowns. Il possède également le record de 36 passes de touchdown en une saison ; il va tenir 21 ans jusqu’à Dan Marino en 1984. Réalisé en 1963 à 37 ans, c’était deux ans après avoir été échangé pour Cordileone qui avait ridiculisé la transaction. Au passage, le Guard avait raison : elle était totalement déséquilibrée, étant largement à l’avantage… des Giants ; Cordileone n’a joué qu’un an en Californie.

Le Million Dollar Backfield : McElhenny, Perry, Tittle, Johnson

Tittle n’a pas le temps de réfléchir à la suite de sa vie : ayant déjà travaillé dans les assurances pendant les intersaisons, il monte sa propre société, Y.A. Tittle Insurance & Financial Services. Il fait également quelques piges comme assistant dans le staff des 49ers et des Giants. Il intègre le Hall Of Fame de chaque franchise avant d’accéder à celui de Canton en 1971 ; il se retrouve dans une classe mythique comprenant quelques visages familiers : un ancien adversaire de l’AAFC – Jim Brown des Browns, un bourreau en finale NFL – Vince Lombardi des Packers, et un ancien partenaire – Andy Robustelli des Giants. Il est le troisième membre du Million Dollar Backfield intronisé successivement, après Perry (1969) et McElhenny (1970) ; il faudra attendre 1987 pour que Johnson y arrive, complétant le quatuor.

Après une longue vie, Yelberton Abraham Tittle s’éteint le 8 octobre 2017 à l’âge de 90 ans. Si tous ses records ont été battus depuis (sauf celui de 7 passes de touchdown dans un match, égalé plusieurs fois), il a laissé un terme iconique du sport et une image éternellement gravée dans l’inconscient collectif, comme un rappel d’une époque révolue… ou presque ; après tout, des Brett Favre, Peyton Manning et Tom Brady ont réussi certaines des meilleures saisons de leur carrière à 37 ans et plus, comme lui.