Fiche Légende : Ernie Nevers

Running Back / Quarterback

 

 

Présentation

 

GENERALITÉS
Nom complet Ernest Alonzo « Ernie » Nevers
Date de Naissance 11 Juin 1903
Lieu de Naissance Willow River, Minnesota
Date de Décès 3 Mai 1976
Lieu de Décès Greenbrae, Californie
CARRIÈRE
Lycée Superior Central, Wisconsin / Santa Rosa, Californie
Université Stanford
Draft Pas de draft à l’époque
Équipes Joueur :
Duluth Eskimos (1926-1927)
Chicago Cardinals (1929-1931)
Entraîneur :
Duluth Eskimos (1927)
Chicago Cardinals (1930-1931, 1939)
Statistiques 5 saisons
54 matchs
7 Field Goals / 52 transformations
Record comme Head Coach : 1-10
HONNEURS
Pro-Bowls
All-Pro 5 (1926, 1927, 1929-1931)
Performances notables Recordman de points consécutifs (59)
Recordman de points dans un match (40)
Récompenses Membre de l’équipe NFL des années 1920
Hall Of Fame Classe de 1963

 

Biographie

 

Avec une spécialisation des postes très poussée, la NFL est un sport qui se prête très bien à l’établissement d’une ribambelle de records, des plus connus aux plus farfelus. Il est aussi de notoriété publique que si certains ont une chance d’être battus au fur et à mesure du temps, d’autres ont été établis dans des périodes où le sport était joué ou organisé de manière tellement différente qu’ils ont peu de chance d’être dépassés. Voici donc quelques questions qui auraient leur place dans tout bon jeu télévisé : quel joueur présent au NFL Hall Of Fame a eu la plus courte carrière ? Combien d’années a-t-il joué ? Quel autre record possède-t-il ? Quelle est la spécificité de ce record ? Si vous lisez ces lignes, vous avez déjà la réponse aux trois premières questions : Ernie Nevers, 5 ans, recordman du nombre de points dans un match avec 40. Nous laissons le suspense pour la dernière réponse.

Ernest Nevers naît en juin 1903 à Willow River, dans l’état du Minnesota. Il est le dernier enfant du couple formé par George et Mary Anne, des aubergistes qui ont déménagé du New Brunswick, au Canada. Les parents vont faire déménager la famille plusieurs fois avant de s’installer dans la ville de Superior, dans l’état du Wisconsin. Contrairement à d’autres futures stars qui promettent de devenir de forts gaillards, le jeune Ernie est un garçonnet en surpoids et assez maladroit qui n’est pas spécialement doué pour le football ; lorsqu’il intègre le lycée de Central et qu’il participe à l’équipe, il est souvent utilisé pour l’entraînement aux plaquages, étant plus lourd que ses camarades.

Au lieu de se décourager, ce traitement durcit Nevers et le pousse à s’améliorer sur le gridiron. D’autant plus qu’il n’est pas totalement démuni en sport : il participe également à l’équipe de basketball et démontre de belles qualités. A l’orée de sa dernière année, sa famille déménage de nouveau, mais cette fois le changement est radical : elle passe du froid hivernal du nord du pays au soleil de la Californie, à Santa Rosa. Les parents s’occupent d’une ferme fruitière, alors que l’adolescent intègre le lycée de la ville. Et cette fois, il n’est plus question d’Ernest le maladroit enveloppé : ayant grandi, à la fois physiquement et mentalement, il devient un sportif accompli. Nevers participe aux équipes de football, basketball et de baseball. Il fait des exploits sur le gridiron, qualifiant Santa Rosa pour les playoffs de la California Interscholastic Federation, et sur les parquets où il est nommé meilleur joueur lycéen de l’état.

Son cursus terminé, il est rappelé par ses anciens entraîneurs à Superior pour aider le lycée, ce qu’il fait volontiers pendant une très courte période. Se pose ensuite la question de l’Université ; Nevers espère pouvoir retourner en Californie pour intégrer la prestigieuse Stanford, mais il lui manque quelques unités. Il reste donc dans le Wisconsin et rejoint le Junior College de Superior ; il en profite pour créer une équipe de football dont il est l’entraîneur-joueur. Véritable homme-orchestre, il court, lance, plaque, bloque et frappe les coups de pied, ce qui lui permet de réussir notamment un match avec 4 touchdowns, 6 transformations et 1 Field Goal ; une performance prémonitoire.

En 1922, une fois les acquis nécessaires, il part pour Stanford où il va devenir le Blond Block Buster ; une référence à la couleur de ses cheveux et à sa domination sur les terrains. Mesurant 1m82 pour 92 kgs, c’est désormais à Nevers de punir ses adversaires sur le gridiron ; à l’instar de ce qu’il a fait à Superior et Santa Rosa, il est le point focal de l’attaque, occupant de multiples fonctions. Après un passage obligé par « l’équipe des élèves de première année », il intègre l’équipe première son année de sophomore et commence ses exploits. En 1923, lors d’un match contre l’Université de Californie, il gagne plus de yards à lui tout seul que l’équipe adverse.

En 1924, il rate la majorité de la saison à cause de fractures au deux chevilles, mais Stanford atteint le Rose Bowl contre Notre Dame et ses mythiques Four Horsemen en attaque. A peine débarrassé de ses plâtres et malgré la défaite 27-10, Nevers fournit une performance hallucinante avec 34 courses pour 114 yards (record du Rose Bowl) soit l’équivalent des quatre membres du Four Horsemen combinés ; il réussit également 42 yards par punt en moyenne. En 1925, il refait une belle saison qui lui vaut d’être voté All-American.

Mais l’extraordinaire capacité athlétique de Nevers ne s’arrête pas là, puisqu’il n’y a pas que sur le gridiron qu’il brille. Il est également un élément vital des équipes de basket, baseball et d’athlétisme : en trois ans seulement, il reçoit 11 « lettres » ou preuves d’excellence dans les quatre sports, soit une de moins que le maximum. Devenu une star universitaire gigantesque qui attire les foules à la seul évocation de son nom, il capitalise sur cela en rejoignant les Jacksonville All-Stars, une équipe semi-professionnelle de football. Il ne joue que deux matchs d’exhibition, dont un où il croise une autre légende vivante de l’époque, Harold « Red » Grange des Chicago Bears, avant que l’équipe ne disparaisse par manque de recettes.

C’est alors qu’un autre sport va accaparer son attention : le baseball. Début 1926, Nevers est signé comme lanceur par les Saint-Louis Browns de la Major League Baseball (l’équipe deviendra plus tard les Baltimore Orioles) ; il joue 12 matchs dans la rotation. Lorsque l’automne arrive et que la saison de baseball se termine, il se tourne de nouveau vers le football ; il rejoint un ami du lycée, Ole Haugsrud, qui a formé la franchise NFL des Duluth Eskimos.

Excité à l’idée d’avoir le fameux Ernie Nevers de Stanford dans son équipe, Haugsrud veut en profiter un maximum et bâtit un calendrier démentiel de 29 matchs en 117 jours à travers le pays, dont cinq matchs en huit jours dans cinq villes différentes ; cela à une époque où les joueurs jouent 60 minutes, étant à la fois en attaque, en défense et sur équipes spéciales. Le Blond Block Buster répond plus que présent : monstre d’endurance, il ne rate qu’une petite demi-heure de jeu en tout (à cause, selon certains, d’une crise d’appendicite) ; il totalise 71 points avec 8 touchdowns, 11 transformations et 4 Field Goals ; cela lui permet d’être voté All-Pro.

A peine sorti de cette épreuve, Nevers retourne chez les Saint-Louis Browns pour reprendre sa carrière de lanceur professionnel ; il croise notamment le légendaire Babe Ruth qui réussit deux de ses 60 homeruns cette saison contre lui. Nouvelle transition vers la saison NFL pour laquelle il devient également le Head Coach de l’équipe des Eskimos ; il y a moins de matchs, mais sa performance dominatrice et complète lui vaut un nouveau vote All-Pro.

1928 va marquer une année charnière dans la carrière sportive du joueur. Au niveau du baseball, il est rapidement vendu par Saint-Louis à l’équipe de ligue mineure de Mission Bells basée à San Francisco ; autant dire que l’arrivée de l’ex-star de Stanford fait du bruit. Au niveau du football, une blessure au dos contractée pendant la saison précédente le pousse à reconsidérer sa carrière, puis à déclarer qu’il se retire après seulement deux saisons. A la place, il décide de rejoindre Glenn « Pop » Warner à Stanford pour devenir assistant coach.

Nevers fait un dernier passage par Mission Bells et le baseball en 1929, avant de revenir sur sa décision d’arrêter le football. Il quitte son emploi d’entraîneur à Stanford et signe chez les Chicago Cardinals comme entraîneur-joueur ; c’est pendant cette saison qu’il va écrire son nom dans le livre des records NFL. Le 24 novembre, dans une victoire 19-0 contre les Dayton Triangles, il score tous les points de son équipe avec trois touchdowns (3*6) et une transformation (1). Et ce n’est que l’entrée du plat de résistance : quatre jours plus tard, le 28 novembre dans une victoire 40-6 à Thanksgiving contre les Chicago Bears, il score A NOUVEAU tous les points de son équipe avec six touchdowns (6*6) et quatre transformations (4*1).

Lors du match suivant contre les New York Giants, Cobb Rooney score sur une passe de Nevers, brisant une série incroyable de 59 points consécutifs marqués par ce dernier, dont 40 en un seul match ; les deux plus vieux records NFL encore d’actualité aujourd’hui (c’est la réponse à la quatrième question de l’introduction). Au bout d’une saison extraordinaire à 85 points (12 touchdowns, 10 transformations, 1 Field Goal), il remporte un nouveau titre All-Pro ; plutôt bien pour quelqu’un qui pensait ne plus rejouer.

Il fait deux saisons supplémentaires, en 1930 et 1931, qui ne sont pas aussi rutilantes mais qui sont excellentes (resp. 48 et 66 points), lui permettant d’être à nouveau voté All-Pro. Début 1932, alors qu’il participe à un match d’exhibition, il se fracture le poignet ; cela le fait à nouveau réfléchir sur la suite de sa carrière sportive. Cette fois, il prend sa retraite pour de bon après seulement cinq saisons, mais cinq années d’une polyvalence et d’un niveau hors du commun dans la jeune NFL et ailleurs. Son ancien entraîneur à Stanford, Pop Warner, a toujours dit qu’entre Ernie Nevers et Jim Thorpe, une autre légende qu’il a eue sous ses ordres, Nevers était le plus complet et le plus motivé ; un énorme compliment quand on sait que Thorpe est largement reconnu comme le meilleur athlète de la première moitié du XXe siècle.

Ernie Nevers, Pop Warner et Jim Thorpe

Justement, après sa carrière, Nevers retourne auprès de Warner dans son alma mater où il sert d’assistant de 1932 à 1935, tout en faisant une petite carrière dans le cinéma. Il va ensuite connaître plusieurs destinations : Head Coach à l’Université de Lafayette en 1936, coach des coureurs à l’Université d’Iowa de 1937 à 1938 et enfin retour chez les Cardinals pour une saison comme Head Coach en 1939 (avec un terrible record de 1-10). Il donne sa démission en 1940 et retourne en Californie, après quoi la Seconde Guerre Mondiale intervient, et ce qui va probablement s’avérer son expérience la plus difficile.

Intégré au corps des Marines, son bataillon est déclaré manquant pendant plusieurs mois, perdu sur une petite île isolée du Pacifique. Plusieurs membres n’y survivent pas ; lui-même atteint par le béribéri (une déficience en vitamine B1), il perd énormément de poids. Comble de malheur, il apprend le décès de sa femme d’une pneumonie pendant qu’il était parti à la guerre.

A la fin de la guerre, Nevers devient assistant coach des Chicago Rockets de l’All-American Football Conference (AAFC), une toute jeune ligne concurrente à la NFL. L’expérience ne dure qu’un an, après quoi il se retire définitivement du monde du football. Il retourne en Californie, se remarie et se lance dans la vente de spiritueux. Il reçoit alors diverses récompenses personnelles et retrouve d’anciens visages : en 1951, il fait partie de la classe inaugurale du College Hall Of Fame avec son coach Pop Warner ; en 1963, il reçoit le même honneur de la part du NFL Hall Of Fame, côtoyant notamment Grange et Thorpe.

Nevers connaît des problèmes de rein à la fin de sa vie et disparaît en mai 1976, à l’âge de 72 ans. Décrit comme « le joueur de football sans aucun défaut » et parfois surnommé Big Dog, Ernie Nevers aura eu une carrière courte mais extrêmement intense et d’un impact tel que personne ne s’est posé la question lors de son entrée au Hall Of Fame. Lorsque l’office des postes américaines décide d’éditer quatre timbres retraçant les premières gloires du football en 2003, Nevers figure en bonne place avec Walter Camp, Grange et Bronko Nagurski. Plus que les records et les performances, ces faits résument bien la valeur du joueur.