Fiche Légende : Curly Lambeau

Fondateur / Head Coach /
Running Back / Kicker

 

 

Présentation

 

GENERALITÉS
Nom complet Earl Louis « Curly » Lambeau
Date de Naissance 9 Avril 1898
Lieu de Naissance Green Bay, Wisconsin
Date de Décès 1er Juin 1965
Lieu de Décès Sturgeon Bay, Wisconsin
CARRIÈRE
Lycée Green Bay East, Wisconsin
Université Notre Dame
Draft Pas de draft à l’époque
Équipes Fondateur :
Green Bay Packers (1919)
Joueur :
Green Bay Packers (1919-1929)
Head Coach :
Green Bay Packers (1919-1949)
Chicago Cardinals (1950-1951)
Washington Redskins (1952-1953)
Statistiques 9 saisons
77 matchs
6 Field Goals / 20 transformations
12 touchdowns
Record comme Head Coach : 229-134-22
HONNEURS
Pro-Bowls Pas de Pro-Bowl à l’époque
All-Pro 3 (1922-1924)
Performances notables Recordman de victoires à sa retraite (229)
Recordman de titres NFL pré-SB – Head Coach (6)
Récompenses 6 titres de champion (1929-1931, 1936, 1939, 1944)
Membre de l’équipe NFL des années 1920
Membre du Packers Hall Of Fame
Hall Of Fame Classe de 1963

 

Biographie

 

Lorsque les Green Bay Packers bâtissent leur nouveau stade en 1957 pour remplacer le vétuste City Stadium, ils manquent d’idées et décident de le nommer le New City Stadium. Deux mois après la disparition brutale de Earl « Curly » Lambeau, le fondateur-entraîneur-joueur qui a amené six titres NFL à la franchise, il semble on ne peut plus logique que l’enceinte soit renommée Lambeau Field ; un nom qui, depuis, est devenu tout aussi mythique que le stade et la franchise elle-même. Et pourtant, aussi surprenant que cela puisse paraître, il y a eu un petit débat à l’époque ; car si personne ne nie l’importance vitale de Lambeau sur l’histoire des Packers, la fin a été bien loin du conte de fées.

Earl Lambeau naît en avril 1898 à Green Bay, dans l’état du Wisconsin. Son père, Marcel, est un maître d’oeuvre dans la construction immobilière dont la famille a émigré de Belgique dans les années 1870 ; la famille de la mère d’Earl, Mary, est originaire du sud de la France. Premier d’une fratrie de quatre enfants (trois fils et une fille), le garçon affiche rapidement une chevelure noire fournie et bouclée qui lui vaut le surnom de « Curly » (« Bouclé »). Ce n’est pas le seul attribut physique qu’il développe, car il est également grand et fort pour son âge.

Cela l’attire bien entendu vers les sports, et particulièrement le football ; il regarde tous les matchs et y joue dès que possible avec des amis. Quand il entre au lycée de East High à Green Bay, il rejoint l’équipe de l’établissement ; il participe également en athlétisme (lancer du poids, du disque et saut en longueur). Rapide et puissant, il fait des merveilles sur le gridiron avec la balle en main, mais ce n’est pas tout : il est un botteur remarquable sur les Field Goals en drop, il est un grand fan de la passe vers l’avant à une époque où elle est très rarement utilisée, et il est un fin tacticien. Son année de senior, non seulement il devient capitaine, mais il appelle lui-même les actions car le Head Coach n’y connaît pas grand-chose.

Lambeau sort du lycée en 1917. Il travaille auprès de son père pendant quelques temps avant d’intégrer l’Université de Notre Dame grâce à une bourse. Il rejoint les Fighting Irish et l’équipe de football du légendaire Knute Rockne au poste de coureur ; malgré des débuts très prometteurs, cela va être de courte durée : à la fin du premier semestre, il est atteint d’une violente angine qui le force à être opéré des amygdales. Il doit attendre plusieurs semaines pour s’en remettre et finit par être tellement en retard dans ses études qu’il ne revient pas à Notre Dame.

Retour à la case locale pour Lambeau en 1919. Il trouve un travail dans l’Indian Packing Company, une entreprise d’emballement de viandes ; une des spécialités de l’état du Wisconsin avec le papier et le fromage. Il gagne bien sa vie (250$ par mois – une belle somme pour l’époque qui correspond à 3500$ actuels) et s’est même marié, mais son amour de football est toujours présent ; s’il l’assouvit un temps en jouant dans les équipes des environs, cela ne lui suffit pas. Par hasard, il rencontre l’éditeur de la rubrique sportive du Green Bay Press-Gazette, George Calhoun ; ce dernier le connaît bien pour l’avoir couvert lors de ses exploits lycéens.

Le journaliste est l’ancienne star de East High se mettent d’accord pour créer une équipe de football. A l’époque, il est courant que les entreprises possèdent des équipes composées de leurs salariés, ou tout du moins qu’elles les sponsorisent. Lambeau parvient à convaincre le patron de l’Indian Packing Company, Frank Peck, de lui prêter 500$ pour créer les uniformes d’une équipe professionnelle qui porterait le nom de l’entreprise.

C’est ainsi que naissent les Green Bay Packers en 1919 dont Lambeau joue le rôle de fondateur, Head Coach et capitaine ; le reste de l’effectif est formé de locaux qui ont joué au football à l’Université. L’équipe connaît un grand succès en faisant une saison à 10-1 en 1919, puis une autre à 9-1-1 en 1920. A l’image de son homme-à-tout-faire, l’équipe est impétueuse et n’a pas peur de casser les codes, puisque Lambeau se sert autant de ses jambes que de son bras avec la passe vers l’avant.

Entre-temps, l’Indian Packing Company connaît des difficultés, étant rachetée par l’Acme Packing Company. Curly parvient à convaincre les nouveaux propriétaires John et Emmitt Clair de continuer à financer l’équipe ; pour avoir un retour sur investissement, il leur propose de rejoindre la jeune ligue professionnelle, l’American Professional Football Association (APFA), née l’année précédente.

Les Packers rejoignent l’APFA en 1921 et font une première saison encourageante à 3-2-1, mais le rêve tourne court : la ligue apprend que l’équipe a fait jouer des universitaires encore en étude sous des noms d’emprunt, ce qui est une violation des règles. Lambeau voit son équipe expulsée en 1922, et parvient tout juste à la faire revenir avec l’appui (financier et moral) d’un voisin qui va pourtant rapidement devenir un ennemi juré : George Halas, le fondateur-entraîneur-joueur des Chicago Bears. Green Bay réintègre presque immédiatement l’APFA (qui change son nom en NFL) mais ce sont désormais les problèmes d’argent qui mettent la franchise en danger. Lambeau et plusieurs investisseurs locaux qui ont aidé les Packers à survivre ne voient qu’une solution pour s’en sortir : transformer l’équipe en organisation à but non lucratif et lever des fonds via une vente d’actions.

Cette méthode totalement inédite en NFL fonctionne et Green Bay peut continuer d’avoir son équipe de football. D’autant plus qu’elle a de la qualité : derrière son homme-orchestre, maître de la formation single wing qui lui permet de courir et passer à volonté, la franchise poste un record cumulé de 46-23-11 entre 1922 et 1928, flirtant parfois avec le titre. Curly ne joue déjà quasiment plus lors de la saison 1929, mais c’est à ce moment qu’il touche le gros lot ; les venues des futurs Hall Of Famers August « Mike » Michalske, Robert « Cal » Hubbard et Johnny « Blood » McNally permettent à l’équipe de passer enfin le dernier palier.

Les Packers remportent le titre haut-la-main dans une saison invaincue (12-0-1) avec un score cumulé de 198-22. Alors que Lambeau passe définitivement de l’autre côté de la touche et stoppe sa carrière de joueur après 9 saisons et 77 matchs, les Packers étendent leur domination sur la ligue avec deux titres consécutifs en 1930 et 1931 ; ils deviennent les premiers à réaliser un triplé. A la surprise de tous, la jeune NFL est renversée par une équipe basée dans sa plus petite ville et qui est la seule qui n’appartienne pas à un riche propriétaire… mais à des personnes comme vous et moi.

Après une période moins faste de quatre ans, Lambeau mène les Packers dans une nouvelle série de finales NFL à la fin des années 1930 grâce à l’arrivée d’un véritable phénomène : le futur Hall Of Famer receveur Don Hutson. Associé à un autre futur Hall Of Famer, le Quarterback Arnie Herber, les deux permettent à Curly de laisser libre cours à son amour de la passe vers l’avant ; le trio invente le système de routes des receveurs et la ligue n’a aucune réponse pour l’attaque aérienne exceptionnelle de Green Bay. La franchise joue trois finales (1936, 1938, 1939) pour deux nouveaux titres en 1936 et 1939. Malgré une finale de division perdu en 1941, Lambeau mène de nouveau son équipe à un titre en 1944.

Hubbard, McNally, Hutson, Lambeau

Ceci dit, c’est bien connu : la victoire efface beaucoup de défauts. Et lorsque la Seconde Guerre Mondiale se termine, les finances des Packers reviennent dans l’équation ; comme beaucoup d’autres, la franchise a subi les contrecoups du conflit. Mais ce n’est pas tout : la personnalité de Lambeau elle-même commence véritablement à poser un gros problème. Il y a d’abord son comportement dictatorial : l’équipe, c’est lui et avant tout lui. Il établit des règles d’une grande sévérité et ne supporte pas qu’on les enfreigne sous peine de lourdes amendes à une époque où les joueurs ne gagnent pas des fortunes. Ensuite, il y a sa réputation de playboy flambeur, dépensant sans compter et attiré par le glamour d’Hollywood ; il divorcera trois fois. Enfin, sur le terrain, il reste accroché à sa single wing, refusant d’évoluer avec son temps.

L’exaspération monte lentement parmi le comité exécutif, qui a été mis en place suite à la vente des actionsjusqu’à la goutte d’eau qui fait déborder le vase. En 1946, Lambeau convainc l’organisation d’acheter Rockwood Lodge, un ancien lieu de retraite pour religieux, afin de transformer l’endroit en centre d’entraînement ultra-chic. L’opération coûte entre 30000$ et 40000$ et s’avère un désastre complet : bien que recouverts de pelouse, les terrains sont en calcaire en-dessous, ce qui lamine les pieds et les jambes des joueurs. Le fiasco met la franchise en grand danger de banqueroute et démarre une lutte intestine entre le comité exécutif et Lambeau pour limiter au possible les pouvoirs de ce dernier. Ce conflit va durer jusqu’en 1950 et entraîner les résultats sportifs avec elle.

Fatigué de se battre, Curly finit par partir en 1950 de la franchise qu’il a créée de ses propres mains, alors que Rockwood Lodge disparaît dans un incendie « d’origine inconnue » qui, coïncidence, permet aux Packers de rembourser leurs dettes et de rester en vie. L’ironie veut que Lambeau devienne ensuite le Head Coach des Chicago Cardinals qui partagent la ville de l’Illinois avec la franchise des Bears de Halas. Les deux hommes ne se sont jamais appréciés, la légende racontant qu’ils ne se sont jamais serrés la main avant ou après un match ; il faut dire que leurs deux personnalités ne pouvaient être plus opposées avec Halas le bon père de famille (que ce soit sur ou en dehors du terrain), et Lambeau le flambeur invétéré. Pour cette raison, il y aura bien plus de respect un peu plus tard entre Halas et Vince Lombardi.

Il passe deux très mauvaises saisons à Chicago pour un record cumulé de 7-15 ; là encore, sa personnalité abrasive joue contre lui. Il devient coach des Washington Redskins en 1952 et va de nouveau se mettre à dos une partie des joueurs, et jusqu’au propriétaire George Preston Marshall ; suite à une dispute avec ce dernier, Lambeau est renvoyé au milieu de la présaison 1954 après un record cumulé de 10-13-1. Il décide de tirer un trait définitif sur le football et de se retirer dans son ranch californien, achevant sa carrière de Head Coach après 33 ans et un record cumulé de 229-134-22.

Malgré cette fin de carrière bien moins reluisante, lorsque le NFL Hall Of Fame ouvre ses portes en 1963, Lambeau fait bien évidemment partie de la classe inaugurale de 17 membres ; il y retrouve Halas, Hubbard, Hutson, Marshall et McNally. Revenu dans le Wisconsin, il décède brutalement d’un arrêt cardiaque en juin 1965, à l’âge de 67 ans ; il a tout de même eu le temps de voir que sa franchise était entre de bonnes mains avec un Lombardi l’ayant menée à deux titres supplémentaires. Deux mois plus tard, les Packers décident de renommer leur stade Lambeau Field, et ce même si certaines voix s’élèvent contre cette distinction à cause de son côté dictatorial et de la fin de la relation entre les deux parties.

Mais la présence de sa statue sur le parvis du stade est bien la preuve que le temps efface les blessures ; la franchise (et la ville) savent ce qu’elles lui doivent. Car, sans un homme à poigne comme Curly Lambeau, jamais les Green Bay Packers n’auraient pu bâtir cette histoire si exceptionnelle dans les sports majeurs américains : la franchise la plus titrée de la NFL se trouve dans la plus petite ville de la ligue et ses propriétaires sont ses fans inconditionnels.