Fiche Légende : Art & Dan Rooney

Propriétaires / Présidents

 

 

Présentation

 

GENERALITÉS
Noms complets Arthur Joseph « Art » Rooney Senior
Daniel Milton « Dan » Rooney
Dates de Naissance Art : 27 Janvier 1901
Dan : 20 Juillet 1932
Lieux de Naissance Art : Coulter, Pennsylvanie
Dan : Pittsburgh, Pennsylvanie
Dates de Décès Art : 25 Août 1988
Dan : 13 Avril 2017
Lieu de Décès Pittsburgh, Pennsylvanie
CARRIÈRE
Lycées Art : Duquesne University Prep, Pittsburgh
Dan : North Catholic, Pittsburgh
Universités Art : Indiana Normal
Dan : Duquesne University
Draft
Équipes Propriétaires / Présidents
Art : Pittsburgh Steelers (1933-1988)
Dan : Pittsburgh Steelers (1975-2002)
Chairman
Art : Pittsburgh Steelers (1933-1988)
Dan : Pittsburgh Steelers (2003-2017)
Statistiques
HONNEURS
Pro-Bowls
All-Pro
Performances notables
Récompenses 6 bagues (1974, 1975, 1978, 1979, 2005, 2008)
Membres du Steelers Hall Of Fame
Hall Of Fame Art : Classe de 1964
Dan : Classe de 2000

 

Biographie

 

On pourrait bien entendu s’arrêter sur les statistiques : depuis la fusion de 1970, lançant l’ère de la NFL comme nous la connaissons aujourd’hui, et jusqu’à la fin de la saison 2016, les Pittsburgh Steelers totalisent le plus de Super Bowls (6), le meilleur ratio de victoires (61.1%), et le moins de Head Coaches (3). La stabilité et le succès sportif de la franchise de Pennsylvanie sont indéniables, mais se limiter à cela serait faire une grande injure à l’impact global qu’ont eu les propriétaires-présidents Art Rooney et son fils Dan ; que ce soit dans l’organisation, dans la ville et dans la ligue toute entière. La NFL ne serait pas la même sans cette famille qui a tant fait sur et en dehors du terrain.

Le patriarche, Arthur Rooney, naît en janvier 1901 à Coulter, dans l’état de Pennsylvanie. Il est l’aîné d’une fratrie de neuf enfants dont le père, Daniel, vient d’une famille de sidérurgistes et dirige un saloon dans la ville alors que la mère, Margaret, vient d’une famille de miniers ; autant dire que la famille Rooney est fermement ancrée dans les traditions de la région. Pendant la jeunesse d’Art, la famille déménage à Pittsburgh dans le quartier de Old Allegheny ; elle habite au deuxième étage d’un immeuble que le père achète pour ouvrir un nouveau saloon. Cela assure que la famille ne manque de rien dans un environnement qui n’est pas facile, mais qui permet aux garçons de se défouler avec les jeunes du quartier dans les activités sportives de l’époque : football, baseball et boxe.

En grandissant, Art intègre l’école paroissiale de Saint-Pierre, les classes préparatoires de l’Université de Duquesne puis les Universités d’Indiana Normal (renommée depuis Université Indiana de Pennsylvanie) et de Georgetown. Il démontre de plus en plus de compétences similaires à son père en se révélant un commerçant avisé et un médiateur écouté. En parallèle, il développe des capacités athlétiques exceptionnelles : il rejoint les équipes de baseball et de football de l’Université de Duquesne où il brille ; après sa scolarité, il évolue dans des équipes semi-professionnelles dans les deux sports. Mais c’est surtout en boxe amateur qu’il excelle, détenant deux titres ; il est tellement bon qu’il est sélectionné pour tenter d’intégrer l’équipe américaine des Jeux Olympiques de 1920 à Anvers. Néanmoins il refuse car il craint que les salaires qu’il perçoit comme joueur semi-professionnel ne rentrent en conflit avec le statut de boxeur amateur.

Au début des années 1930, Art est un jeune adulte qui exhibe déjà toutes les qualités qui feront de lui un homme adulé : loyal, généreux, proche des gens, très attaché à ses racines ouvrières avec une grande qualité d’écoute et de conseil ainsi qu’un grand amour du sport ; il est promoteur de boxe et dirige des équipes semi-professionnelles. Il se marie avec Kathleen McNulty et démarre une famille dont le premier fils, comme de tradition, porte le prénom de son père : Daniel naît en juillet 1932.

Art rêve d’intégrer la ligue professionnelle de football, et la NFL a également un intérêt pour la région de Pittsburgh qui est un vivier pour le sport avec plusieurs Universités réputées. Il existe depuis plusieurs années un gros écueil à la création d’une franchise dans la Steel City, mais heureusement pour les deux parties, il disparaît : l’état de Pennsylvanie relâche les blue laws, des lois empêchant de travailler le dimanche, jour des matchs de NFL. Lorsque cela arrive, Art met à contribution une autre de ses capacités : son nez pour les courses hippiques. La légende raconte qu’un jour de 1933, il gagne les 2500$ qui sont nécessaires à la création de son équipe et à son intégration en NFL. Comme c’est souvent le cas dans les villes avec un club de baseball connu, pour attirer l’attention sur sa franchise, il lui donne le même surnom : les Pittsburgh Pirates (le nom complet étant Pittsburgh Pirates Football Club pour ne pas confondre). Leurs couleurs reprennent celles du drapeau de la ville : noir et or.

La nouvelle équipe est placée dans la Division East avec les New York Giants de son ami Tim Mara, les Brooklyn Dodgers, les Boston Redskins (futurs Washington Redskins) et les voisins de Pennsylvanie, les Philadelphie Eagles, qui eux aussi ont profité de la modification des blue laws pour se former. Mais malheureusement pour Art, les débuts en NFL vont être très compliqués : les Pirates sont d’un niveau au mieux moyen et au pire abyssal, incapables de pérenniser un quelconque succès dans les années 1930. En pleine Amérique de la Grande Dépression, l’équipe ne survit que grâce à une réussite miraculeuse de son propriétaire aux courses : en 1936, il parvient à gagner 300,000$ en deux jours, une somme totalement astronomique pour l’époque. Cela lui permet de réussir des coups, comme la signature du Head Coach Joe Bach ou de l’All-American Baron « Whizzer » White pour 15,000$, mais cela n’apporte pas de succès sur le terrain.

En 1940, Art essaie de donner une identité propre à sa franchise avec un nouveau surnom. Un concours est organisé, et c’est « Steelers » qui l’emporte pour faire référence à l’industrie phare de la région, la sidérurgie. Mais cela ne change rien à l’état sportif ou financier de l’équipe ; pire, bien que le pays ne soit pas encore entré dans la Seconde Guerre Mondiale, il pourrait finir par le faire, risquant d’envoyer des joueurs au front. Cela finit de décourager le patriarche qui décide d’appeler son ami Bert Bell, propriétaire des Philadelphie Eagles et Alexis Thompson, un entrepreneur de New York qui pousse Art à vendre depuis des mois.

Ils montent ensemble une opération assez curieuse : Rooney vend les Steelers pour 160,000$ à Thompson, puis rachète 50% des Eagles ; l’ensemble des joueurs des franchises est redistribué entre les deux clubs. Arrive alors un problème de localisation : Thompson n’est pas motivé pour venir à Pittsburgh, et après quelques semaines Art commence à regretter sa vente. Début 1941, un nouvel échange d’équipes a donc lieu : Thompson se retrouve avec les Eagles (situés à Philadelphie qui est bien plus proche de New York), et le duo Bell-Rooney récupère les Steelers. Puisque aucun match n’a eu lieu entre-temps, on considère qu’Art Rooney n’a jamais quitté la tête des Steelers ; ce même si, par la suite, le club a évolué quelques années en tant que Philadelphia Eagles Football Club, Inc.

Ce tour de passe-passe unique en NFL une fois terminé, le problème reste le même : les « nouveaux » Pittsburgh Steelers ne sont pas meilleurs que les anciens. Les deux franchises de Pennsylvanie se retrouvent bientôt, en 1943, lorsque Rooney, Bell et Thompson sont forcés de fusionner les effectifs suite aux joueurs partis faire la guerre : les « Steagles » jouent une année pour finir 5-4-1, une saison positive très rare pour les deux équipes. Malgré toutes les qualités d’Art en tant qu’homme et propriétaire qui lui permettent d’être adoré par l’organisation et respecté dans la ligue entière, cela ne se traduit pas forcément sur le terrain, car, parfois, sa loyauté est mal placée.

Entre 1933 et 1968, les Steelers ne postent que sept saisons positives, incapables d’élever leur niveau ; c’est donc surtout pour son rôle de médiateur et de conseiller dans les instances de la NFL qu’il est intronisé au Hall Of Fame en 1964. Pour que le succès sportif intervienne à son tour, il va falloir attendre une conjonction d’événements dans les années 1970, le principal instigateur n’étant autre que le fils de The Chief (qu’on surnomme ainsi à cause de sa ressemblance avec le personnage de Perry White, le patron du Daily Planet dans Superman).

Pendant que le club lutte pour survivre dans les années 1940 et 1950, le jeune Dan, aîné d’une fratrie de cinq enfants, assiste son père dès qu’il le peut, mais il doit d’abord s’occuper de son éducation : comme lui, il révèle des qualités remarquables dans les salles de classe et sur les terrains de sport. Il intègre le lycée de North Catholic où il fait des prouesses sur le gridiron en tant que Quarterback ; il est voté dans la seconde équipe des meilleurs joueurs de la Catholic League. La petite histoire veut qu’il soit barré de la meilleure équipe par un jeune talent local qui n’est autre que le futur Hall Of Famer Quarterback Johnny Unitas ; le comble de l’ironie est que Unitas sera drafté en 1955 par les Steelers et libéré quasiment aussitôt dans une des décisions les plus dommageables de l’histoire de la NFL.

Dan continue sa scolarité en intégrant l’Université de Duquesne (la même que son père), d’où il sort en 1955 avec un diplôme de comptable et un poste déjà tout trouvé dans l’organisation des Steelers. Au fur et à mesure des années, Dan gravit les échelons et prend de plus en plus de responsabilités alors qu’Art commence à diversifier ses opérations : il prend part au retour du hockey professionnel, la NHL, avec la création des Pittsburgh Penguins, et fait plusieurs acquisitions dans le domaine des courses hippiques. A la fin des années 1960, Dan et son frère Arthur Junior ont pris les commandes des opérations quotidiennes de l’équipe, et ce sont eux qui vont prendre une décision majeure dans la recherche d’un nouveau Head Coach après la saison 1968. Alors qu’Art continue de marcher souvent à l’affectif dans ce choix (d’où la loyauté mal placée), les deux frères sont plus pragmatiques et jettent leur dévolu sur un ancien joueur des Browns et Coordinateur Défensif des Colts : Charles « Chuck » Noll.

L’arrivée de Noll, la modernisation de l’organisation impulsée par Dan et la révolution du mode de scouting menée par Art Junior vont amener un influx de jeunes joueurs talentueux ; cela va enfin permettre à la franchise de connaître le succès après la fusion AFL-NFL de 1970. Et quel succès : les Steelers deviennent tout simplement la dynastie de la décennie avec quatre victoires au Super Bowl (1974, 1975, 1978, 1979). Si Art continue de chapeauter sa franchise, voyant au passage le nouveau stade des Steelers, Three Rivers Stadium, bâti sur le terrain occupé par la maison de son enfance, c’est bien Dan qui est la figure de proue de ce succès en devenant propriétaire-président en 1975 ; il poursuit dans la même lignée que son père : gentillesse, humilité, coeur sur la main, écoute et conseil qui font de lui le partenaire privilégié des propriétaires et des commissioners de la NFL.

Art, Art Junior et Dan Rooney

Cela lui permet d’accéder à plusieurs hautes fonctions : en 1973, il est président du Comité d’Expansion qui vote l’attribution des nouvelles franchises de Seattle et Tampa Bay. En 1976, il est président du Comité de Négociation qui doit mener les discussions sur le nouveau Collective Bargaining Agreement (CBA) de 1982, après la première grève des joueurs. Il est également des négociations pour stopper la deuxième grève des joueurs en 1987.

Quelques mois plus tard, le 25 août 1988, Art Rooney – The Chief – l’homme au cigare – disparaît à l’âge de 87 ans. Lors d’un discours, le commissaire du comté d’Allegheny déclare qu’Art était devenu le citoyen numéro un et qu’il avait plus fait pour la ville de Pittsburgh que ses maires respectifs. Plus que la franchise des Steelers, c’est l’état de Pennsylvanie et la NFL qui pleurent la perte d’un propriétaire dont les qualités humaines sont perpétuées par ses fils.

Dan continue le travail en étant de nouveau instrumental dans la création de la Free Agency en 1993. Il reçoit bientôt les mêmes honneurs que son père en étant intronisé au Hall Of Fame de la NFL en 2000, continuant ainsi de tisser les liens reliant les familles Rooney et Mara : non seulement elles sont les seules à avoir un duo père/fils à Canton (Art/Dan et Tim/Wellington), mais le petit-fils de Wellington est marié à la petite-nièce de Dan.

La contribution la plus reconnue de Dan Rooney arrive en 2003, lorsqu’il est le président du Comité pour la Diversité qui édicte la Rooney Rule nommée d’après lui : elle force l’interview des candidats issus de minorités pour les postes de General Managers et Head Coaches. En effet, l’intégration a toujours été un maître mot pour les Rooneys, notamment de l’autre côté de la touche : le Hall Of Famer Head Coach Tony Dungy a commencé comme assistant à Pittsburgh quand il était rare que les afro-américains aient leur chance, et ils ont nommé en 2006 le Head Coach Mike Tomlin qui a mené l’équipe à un Super Bowl en 2008. Entre-temps, l’équipe en a gagné un autre avec Bill Cowher, en 2005, ce qui met de nouveau en exergue la loyauté de la famille avec ses entraîneurs : Noll, Cowher et Tomlin sont les seuls Head Coaches des Steelers depuis 1969 !

A cette époque, Dan a déjà commencé à se retirer discrètement de la franchise comme son père l’avait fait avant lui ; le processus démarre en 2002 quand il nomme son fils Arthur II comme président. Cela lui permet de se tourner vers la politique ; il soutient la campagne de Barack Obama, lequel le remercie après son élection en le nommant ambassadeur des États-Unis en Irlande, le pays d’origine des Rooneys. Il occupe le poste jusqu’en 2012.

Il doit également faire face à un problème dans la deuxième partie des années 2000 : le fait que les Rooneys soient à la fois propriétaires d’une franchise NFL et d’hippodromes possédant des machines à sous est incompatible avec les lois de la ligue sur les jeux d’argent. La solution est soit une vente pure et simple de l’équipe, soit un rachat par Dan des parts de certains de ses frères qui se tourneraient exclusivement vers les hippodromes, séparant les deux affaires distinctement. La ligue refusant de voir la famille quitter la NFL, un arrangement finit par être trouvé.

Dan disparaît à son tour le 13 avril 2017 à l’âge de 84 ans. Comme pour le décès d’Art, la nouvelle déclenche un torrent unanime de respect de la part de l’organisation des Steelers, des exécutifs de la NFL et des 31 autres franchises. Outre le succès sportif que Dan a apporté par ses décisions, c’est encore une fois l’homme qui a laissé une empreinte indélébile dans la vie de chacun de ses employés, partenaires et adversaires.